Lors de la conférence de presse d’avant-match France-Maroc, qui se dispute aujourd’hui (20h) au stade Al Bayt, le sélectionneur des Lions de l’Atlas a délivré une nouvelle masterclass avant la première demi-finale de l’histoire de son pays. Extraits choisis.
À la veille d’une demi-finale historique entre son Maroc et l’équipe de France, Walid Regragui, le guide des Lions de l’Atlas, s’est présenté en conférence de presse, hier à Doha, et a scotché son monde.
Le natif de Corbeil-Essonnes a d’abord évoqué la place de cette rencontre dans l’histoire : «Plus on avance dans la compétition, plus les matchs sont difficiles. Demain, on va affronter la meilleure équipe du monde, entraînée par le meilleur sélectionneur du monde, mais on va essayer de continuer sur ce qu’on sait faire pour tenter de créer la surprise. J’entends depuis quelques jours que l’on devrait être contents d’être arrivés en demi-finales, mais non. On est venus ici pour changer les mentalités, notamment celles de l’Afrique. On n’est pas ici par hasard. Je disais avant la compétition qu’on rêvait de gagner la Coupe du monde et on se rapproche de notre rêve. J’ose espérer.
On a faim. Est-ce que ça va suffire ? Ça peut. On a envie de mettre l’Afrique sur le toit du monde, et je le dis : il faudra être fort pour nous sortir de cette compétition.
Je suis peut-être fou, mais c’est bien d’être fou. Personne n’est fatigué, personne n’est rassasié : demain, on va courir, on veut gagner, notre énergie peut rééquilibrer les débats. On a une opportunité, je ne veux pas la gâcher. Je ne veux pas attendre 40 ans. Il y a des moments où il faut marquer son territoire, c’est le moment».
Regragui a aussi eu quelques mots pour les personnes qui ont caricaturé l’approche de son Maroc. «Ah, la possession de balle, ça vous fait rêver, a-t-il expliqué. Mais quand vous avez 60-70 % de possession de balle, que vous faites deux tirs dans le match, que votre attaquant rate ces occasions… Tu aurais dû gagner parce que tu as eu 4xG, mais nous, on est là pour gagner et en face de moi demain, j’aurai un sélectionneur qui a très bien compris ça.
On se fiche des xG, des datas, d’avoir la possession. Avant la compétition, on avait quoi, 0,01 % de chances d’être en demi-finales ? On est a 12% maintenant ? Al Hamdoulilah, mais je vais demander à Gianni Infantino qu’il rajoute des points au-delà de 60 % de possession. On tient un truc, là. Attention, moi aussi, je suis passé par là. À un moment donné, Guardiola m’a aussi rendu fou. C’est sûr que quand tu as De Bruyne, Bernardo Silva… Mais gagner est ce qui m’importe aujourd’hui. Je crois aussi que ça embête certains, notamment les journalistes européens, de voir une équipe africaine jouer comme une équipe européenne. Aujourd’hui, ça nous porte : on a envie de gagner pour l’Afrique, pour les pays qui sont en voie de développement, pour qu’ils apprennent qu’on peut gagner. Il n’y a pas qu’une manière de jouer. Je prends exemple sur la France : ils ont tout compris en 2018. Ils ont explosé tout le monde. C’est la meilleure équipe. Si on peut prendre exemple sur la France, c’est très bien. Après, peut-être que demain je vais passer pour un con, mais c’est pas grave».
Le sélectionneur du Maroc a également tenu à préciser deux-trois choses sur son histoire personnelle : «Oui, j’ai grandi à Corbeil, dans un quartier populaire, mais je n’ai pas envie de faire l’histoire du jeune de banlieue qui a réussi.
Là aussi, j’ai envie de changer les mentalités. Compétence, point. Que tu viennes de banlieue ou de Saint-Germain-en-Laye, compétence. Venir d’un quartier fait que je me bats deux ou trois fois plus, ça aide à avoir deux fois plus faim, mais je ne suis pas là pour créer une histoire.
J’essaie juste d’avoir le meilleur parcours possible, et s’il aide à faire rêver des gens, tant mieux. Je suis ambitieux. On n’est pas là pour rigoler».