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mercredi 4 octobre 2023

Une impérieuse réconciliation

Le rétablissement des relations diplomatiques entre l’Iran et l’Arabie saoudite, en principe effectif dès la réouverture des leurs ambassades respectives, ce qui à son tour est censé s’achever au plus tard dans deux mois, est déjà en soi un événement important dans notre région prise au sens large. Il est même le plus important qui se soit produit depuis les bouleversements survenus il y a maintenant plus d’une décennie dans le monde arabe, regroupés pêle-mêle sous le titre de Printemps arabe. Il l’est tout autant par la façon dont il a vu le jour, mais aussi pour la toile de fond sur laquelle il se détache, celle de la guerre en Ukraine, elle-même un tournant dans l’histoire mondiale récente. Le fait que la Chine, couronnant les efforts de deux autres médiateurs, ait joué un rôle décisif dans sa finalisation n’est pas moins significatif de la nouvelle marche du monde. Pour preuve, le fait que l’on ne s’y attendait guère, alors même que l’on savait que Saoudiens et Iraniens étaient engagés dans des pourparlers, soit prioritairement pour faire cesser la guerre au Yémen, soit en premier lieu pour renouer le fil de leurs relations rompu en 2016, soit pour tout cela à la fois, ce qui d’ailleurs semble plus logique.

Mais un événement n’est pas important juste parce que détrompant les attentes il s’est produit, ou seulement parce qu’il a surmonté des obstacles en principe infranchissables, il l’est davantage par ses conséquences, en vue desquelles des efforts ont été consentis pour le faire exister. Et alors de deux choses l’une : ou bien il se prolonge en elles, ou bien il n’y parvient pas. Dans le cas de celui dont il est question, s’il ne débouchait sur aucune des solutions espérées par les uns, redoutées par les autres, qui font sa raison d’être, ce serait comme s’il se renversait en son contraire. Au lieu de mettre définitivement fin à la marche à la guerre, entre d’un côté l’Iran, et de l’autre une coalition sunnite dirigée non pas par l’Arabie saoudite mais par Israël, par cela seul qu’il a été possible, il rendrait par son échec cette même guerre inévitable. Israël aspire à cette guerre non pas tant par crainte d’un Iran en possession de l’arme nucléaire que pour constituer une alliance militaire régionale dont bien sûr il se voit assumer la direction. Il ferait d’une pierre deux coups s’il y parvenait : il détruirait l’Iran, son ennemi juré, et il liquiderait la cause palestinienne, deux réalisations majeures obtenues qui plus est avec la collaboration des Arabes. Or pour que le rétablissement des relations irano-saoudiennes n’aboutisse pas à terme à un échec, il faut qu’il se traduise par des solutions aux crises nées de la détérioration de ces mêmes relations, puis de leur rupture. Au Yémen, en Syrie, et au Liban, la rivalité mettant aux prises l’Arabie saoudite et l’Iran, a provoqué les divisons, les affrontements, et les souffrances que l’on connaît, qui sont condamnés à se poursuivre si ces deux puissances régionales ne s’entendent pas pour y mettre fin. Deux guerres et une paupérisation poussée jusqu’à la misère, celle du Liban, un pays pourtant en paix, des tragédies innombrables, une descente aux enfers qu’il est urgent de stopper, dont il faut ensuite renverser le cours. Un but d’ensemble qui exige pour sa réalisation plus que le rétablissement des relations diplomatiques entre l’Iran et l’Arabie saoudite, leur complète réconciliation, leur alliance dans un monde en recomposition.

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