Révision du Code du commerce, mesures incitatives pour l’export et l’investissement

Le Président Tebboune libère l’économie

Réduire la dépendance aux hydrocarbures d’au moins 80%, cibler et baisser le niveau des importations, porter d’ici la fin 2021, les exportations à hauteur de 5 milliards de dollars contre 2 milliards de dollars actuellement, la révision du commerce, la dépénalisation de l’acte de gestion, mettre en place une industrie de transformation des produits agricoles, améliorer le climat des affaires et de l’investissement créateur de richesses et d’emplois…sont là autant d’actions que le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, entend mettre en œuvre pour insuffler une dynamique à la nouvelle politique économique du pays qui définitivement devra rompre avec la rente pétrolière.

Par Lynda Naili

Hier, le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, à l’ouverture de la conférence nationale sur le Plan de relance pour une nouvelle économie qui se tient au Centre international des conférences (CIC)-Alger, a affiché devant les membres du gouvernement et les partenaires économiques et sociaux, son intention de définitivement rompre avec la logique de la rente des hydrocarbures sur laquelle ont été menées, jusque-là, les différentes et successives politiques économiques du pays. Estimant que la dépendance quasi-totale de l’économie nationale à la rente pétrolière «est fatale pour l’intelligence et l’esprit d’initiative», le Président de la République a souligné l’impératif «d’augmenter les exportations hors hydrocarbures à 5 milliards USD d’ici la fin 2021», contre les 2 milliards USD actuels. «Jusqu’à quand poursuivra-t-on dans cette logique des importations au détriment de la production nationale ?», s’est indigné le Président de la République qui mise, qu’à compter des deux prochaines années, la dépendance aux hydrocarbures devra être réduite d’au moins 80% contre 98% actuellement. «Les exportateurs ont besoin d’être encouragés et non combattus», a soutenu Abdelmadjid Tebboune, allusion faite aux entraves auxquelles ont été confrontés les exportateurs ces dernières années. Dans ce sens, il appellera les investisseurs et les entreprises économiques à travailler sur la réduction de la facture d’importation des services. Chiffres à l’appui, il dira que la facture annuelle des services de transport s’élevait à 12,5 milliards USD, dont 3,4 milliards USD pour les frais du transport maritime de marchandises». Il est primordial de trouver une solution à cette situation en vue de réduire les transferts en devises», a estimé le chef de l’Etat. Pour cela, il affirmera ne voire «aucune objection, aujourd’hui, à ce que des investisseurs privés créent des compagnies de transport aérien et maritime de marchandises et de voyageurs».

Une batterie de mesures pour l’encouragement des exportateurs
Pour ce faire, le chef de l’Etat a annoncé une batterie de mesures incitatives à mettre en œuvre «dès maintenant» pour l’encouragement des exportateurs et la dynamisation des exportations algériennes hors hydrocarbures. «C’est très faisable», a-t-il assuré, d’autant, dira-t-il que «la volonté politique est forte et la vision claire» sont aujourd’hui là « pour construire une économie nouvelle, non fondée sur la rente pétrolière ». A ce titre, évoquant les mesures incitatives décidées au profit des exportateurs, il citera la révision du commerce, la création de tribunaux commerciaux au niveau national, en associant les gérants des entreprises économiques et commerciales. La dépénalisation de l’acte de gestion afin de libérer les gestionnaires et encourager la performance et l’initiative, l’instauration de couloirs verts pour certains produits, la cession d’une bonne partie de recettes en devises au profit des exportateurs et l’amélioration de la relation avec le ministère des Finances et l’Administration fiscale. Dans ce contexte, il soulignera «l’impératif soutien de la diplomatie nationale à travers les Chambres de commerce et les antennes économiques et commerciales au niveau des représentations diplomatiques nationales à l’étranger» à cet effort d’exportation afin de favoriser et de faciliter l’accès des produits algériens aux marchés extérieurs, notamment ceux qui, d’ores et déjà, ont affiché leur intérêt au marché algérien. Appelant ainsi à orienter le regard des exportations vers le continent africain. Et c’est d’ailleurs là que le Président montrera son indignation de la situation actuelle du système bancaire national : préconisant la révision du système bancaire algérien qu’il a qualifié de «simple guichets publics». Déplorant l’absence de banques privées algériennes, aussi bien dans le pays qu’à l’étranger, il s’est interrogé sur «ce qui empêcherai la création de banques privées ?». «Et pourquoi pas en partenariat avec des banques publiques ?» a-t-il suggéré. Ainsi, saluant les opérateurs économiques qui exportent des produits à haute valeur ajoutée, à l’image des pneus exportés vers les Etats-Unis et les produits cosmétiques vers les marchés africains», le Président, à l’endroit des chefs d’entreprises présents dans la salle, assurera de la détermination de l’Etat à encourager les exportateurs producteurs de valeur ajoutée «et non les pseudo-exportateurs automobile qui ne font, en réalité, que dans le gonflage pneumatique». A ce propos, il ne manquera pas de qualifier ce qui s’est fait ces dernières années dans le secteur automobile de «manipulation» de l’économie nationale qui «a failli faire basculer le pays dans le précipice».


10 à 12 mds USD de réserves de change à des financements d’investissements
S’agissant de l’investissement, réitérant l’engagement de l’Etat à accompagner les exportateurs et les investisseurs dans la diversification de l’économie nationale, le chef de l’Etat assurera que pas moins de 1 900 milliards de DA de disponibilités bancaires ont été ainsi réservés aux investisseurs au titre de l’année en cours pour le financement de l’investissement. Et d’évoquer à ce sujet, la possible affectation, durant l’année en cours, de 10 à 12 mds USD de réserves de change à des financements d’investissements. Pour peu, dira-t-il, que ces investissements répondent aux critères de «patriotisme», de «la sincérité économique» et de «la participation à l’intégration économique à hauteur de 45% au moins». En effet, pour le Président, il n’est plus question désormais d’ «accorder des crédits d’investissements qui serviront à l’acquisitions de biens immobiliers à l’étranger». Revenant sur la situation financière globale du pays, il a estimé qu’elle était «difficile», mais «soutenable», avec des réserves de change de 57 milliards de dollars et 24 milliards de dollars de recettes pétrolières attendues jusqu’à la fin de l’année. Dans ce contexte, et à nouveau, Tebboune réitèrera «son refus catégorique» de recourir à l’endettement extérieur, quelle qu’en soit la forme. Pour le Président, la situation financière du pays est «supportable» même si c’est «difficile». Le budget 2020 a été établi sur la base d’un prix référentiel de 30 USD/baril alors que le prix moyen est de 44 USD, ce qui, dira-t-il, offre «une aisance» dans le financement budgétaire.

Accélérer la numérisation pour mettre fin à «l’opacité volontairement entretenue»
Enfin, en vue de réussir le défi du développement, le Président a insisté sur l’accélération du processus de numérisation des secteurs économiques et financiers pour en finir avec «l’opacité» créée «volontairement» au sein de ces secteurs. A ce titre, il a appelé à l’accélération de la numérisation de tous les secteurs économiques et financiers pour éliminer «l’opacité qui y est sciemment entretenue» et la consécration de la transparence en vue de relancer l’économie nationale. Ainsi, fustigeant «la non-numérisation, à ce jour, de ces secteurs sensibles, notamment le secteur fiscal et les services des Domaines de l’Etat», il dira que ces administrations «continuent à fonctionner avec des moyens et méthodes désuets et dépassés ne permettant même pas de connaître ce que possèdent les Algériens comme fonciers et entreprises au niveau national». Partant de ce constat, le Président de la République a ordonné l’accélération des réformes financières et fiscales, affirmant que le paiement des impôts ne devrait plus être perçu comme une sanction, mais plutôt comme une incitation à l’amélioration des recettes et à la création d’emplois. A ce propos, il a fait savoir que l’entreprise nationale Cosider, par exemple, figure parmi les cinq premiers contribuables alors que des sociétés privées avec des chiffres d’affaires annuels supérieurs à 20 mds USD viennent à la 54e place.


L. N.