En 2017, lors de sa campagne pour les élections présidentielles, Emmanuel Macron avait un discours foncièrement de gauche sociologiquement et de centre droit économiquement, laissant de côté les grandes thématiques régaliennes. Le président français avait commencé à aborder ces thèmes-là après sa crise des «gilets jaunes» lors de laquelle il avait très copieusement usé des forces de police pour faire taire toute contestation. Depuis, les questions de sécurité, d’immigration ou même d’identité sont devenues omniprésentes dans son programme, même si pas prioritaires. Les Français, pour leur part, ont toujours autant de mal à considérer le président, élu par deux fois, comme capable de régler les problèmes de sécurité, qui se multiplient et qui sont aujourd’hui l’une des préoccupations principales des Français. C’est ainsi, sans surprise, que les trois quarts des Français jugent négativement le bilan sécuritaire du chef de l’État. Un chiffre en nette hausse par rapport au début de son premier quinquennat. «En 2018, 41 % des Français jugent positif le bilan sécurité d’Emmanuel Macron. En 2022, ils sont
31 % avant la campagne présidentielle. Ce mois d’août, on descend à 25 %. C’est un score plancher !», relève Frédéric Dabi, directeur général du département Opinion de l’Ifop. Il remarque également que «dans toutes les catégories de population, le jugement positif du bilan de Macron est devenu minoritaire». Y compris dans son socle électoral, où plus d’un tiers de ceux qui ont voté pour Macron à la présidentielle de 2022 estiment que le compte n’y est pas. De leur côté, 87 % des électeurs de Valérie Pécresse jugent négativement l’action du chef de l’État dans ce domaine. Un score qui recule de cinq points chez ceux de Jean-Luc Mélenchon. Ainsi, les Français ayant voté pour le chef de file des Insoumis à la présidentielle estiment-ils à 82 % négatif le bilan sécuritaire d’Emmanuel Macron. «Sur la sécurité, le clivage gauche-droite se transforme en ‘’tout sauf Macron’’», observe Dabi. Dans le détail, les Français ne créditent au Président réélu un bilan positif qu’en matière de terrorisme. Sur la lutte contre les rodéos urbains (21 %), la délinquance et la criminalité (25 %), le maintien de l’ordre au quotidien (30 %), seule une (très) petite minorité de Français donne quitus au chef de l’État. Et le directeur général du département Opinion de l’Ifop de conclure : «La sécurité reste un sujet talon d’Achille pour le président et le gouvernement». Étrangement, plus le gouvernement évoque ces questions régaliennes, moins il semble crédible pour les traiter et pour apporter de réelles solutions aux problèmes des Français sur le plan sécuritaire. Et avec la perte de sa majorité à l’Assemblée Nationale, le président français ne peut pas faire grand-chose sauf à soumettre un texte qui satisferait les députés du Rassemblement National qui ont assuré, après les résultats des législatives il y a deux mois, qu’ils voteraient les textes soumis par le gouvernement à condition qu’ils les jugent en adéquation avec leur propre politique sécuritaire. Reste à voir si Macron sera prêt à travailler avec les députés RN pour mettre en place des lois régaliennes fortes, ou si le «cordon sanitaire» revendiqué par de nombreux élus Renaissance (parti présidentiel) empêchera toute collaboration sérieuse et fructueuse.