Finalement la rencontre de Vienne de mardi dernier, entre les parties prenantes à l’accord de Vienne sur le programme nucléaire iranien, ne s’est pas déroulée exactement comme prévu. Il avait semblé acquis avant cela qu’à la différence de la réunion de Genève qui l’avait précédée de moins d’une semaine, et où les Etats-Etats n’avaient pas eu de représentants dans la salle, celle de Vienne se tiendrait au grand complet, que les Etats-Unis y seraient donc admis, sauf que leurs négociateurs ne seraient pas autorisés à s’adresser directement à leurs homologues iraniens. Une information avait filtré dès ce moment que les Iraniens en fait ne voulaient pas se trouver en présence des Américains à Vienne non plus. Maintenant on sait qu’en effet à Vienne, la négociation s’est déroulée dans deux hôtels différents. Dans l’un se sont retrouvés tous les signataires de l’accord de 2015, dont les Etats-Unis s’étaient retirés en 2018, moins ces derniers ; et dans l’autre, la délégation américaine toute seule, qui suivait et peut-être intervenait dans les débats par l’intermédiaire de leurs alliés européens présents quant à eux dans la même salle que les Iraniens.
Avec un dispositif aussi inhabituel pour une négociation s’annonçant serrée, toutes les parties prenantes auraient dû être mécontentes et tout à la fois impatientes de le faire savoir. C’est le contraire qui s’est produit : tout le monde a tenu à exprimer sa satisfaction du tour pris par l’événement, les Américains tout les premiers. Il faut donc croire qu’on a fort bien fait de mettre à distance les uns des autres Américains et Iraniens. Ils se seraient trouvés en présence les uns des autres, les choses auraient peut-être mal tournées entre eux. Trêve de plaisanterie. Si les Américains sont descendus dans un hôtel et tous les autres dans un autre, c’est probablement sur la demande des Iraniens, conduits par leur ministre des Affaires étrangères, quelqu’un dont la réputation de finesse n’est plus à faire. Du rendez-vous de Genève à celui de Vienne, les Etats-Unis ont néanmoins fait avancer quelque peu leur affaire : ils n’avaient pas eu voix au chapitre lors du premier ; en revanche, ils se sont exprimés par la voix d’autrui lors du deuxième. Le progrès est indéniable. On ne sait trop combien il faudrait d’autres occasions du même genre avant qu’ils ne retrouvent toute leur place parmi les autres parties prenantes à l’accord de Vienne. Une, deux, trois, ou plus ? A l’évidence, cela dépendra davantage des changements qu’ils veulent introduire dans l’accord que de leur disposition à lever les sanctions prises par l’administration Trump contre l’Iran en même temps qu’elle se retirait de l’accord. La levée des sanctions n’est plus du point de vue des Iraniens la condition sine qua non en vue de la reprise de la négociation. Il est une chose dont ils ne veulent même plus entendre parler, c’est de devoir renégocier quoi que ce soit concernant leur programme nucléaire. Pour eux, cette négociation a déjà eu lieu. Elle s’est étalée sur des années, pour déboucher au bout du compte sur l’accord de 2015, dûment paraphé par toutes les parties prenantes, dont les Etats-Unis. Pour eux, pas une virgule n’y est à changer. C’est précisément ce message qu’ils sont en train de marteler à l’usage des Américains, dont le but clairement affiché est non pas de réintégrer l’accord mais de le renégocier pour ainsi dire de fond en comble.