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lundi 27 mars 2023

Russes et Américains ne se parlent plus

Joe Biden a terminé vendredi son discours véhément de Varsovie, tout à la fois rédigé et prononcé pour faire date, par : «Cet homme ne doit pas rester au pouvoir». Cette chute ne comportait aucun nom, mais comme il n’a fait depuis le premier mot que parler de Vladimir Poutine, antérieurement qualifié par lui de criminel de guerre, puis de boucher, il n’avait pas besoin d’être explicite pour être parfaitement compris. Les Russes ont à chaque fois répondu en dénonçant l’hystérie à laquelle serait en proie la classe politique américaine, pas seulement Biden, en particulier depuis le 24 février, ajoutant pour cette fois-ci que ce n’était pas au président américain de désigner, ou de renverser, le leur. D’habitude, ils se contentaient de déplorer ces écarts de conduite, dans un langage au contraire plein de mesure et de patience, destiné sans doute à mieux faire ressortir la vulgarité à laquelle recourent les responsables lorsqu’il est question d’eux. Il faut croire que Biden ne peut résister au plaisir d’insulter son homologue russe, une tendance qu’on n’a vu ni à Donald Trump, ni à Barack Obama, qui pourtant n’avait pas une bonne opinion de Poutine, à la différence de Trump, à ce qu’il semblait en tout cas. Biden lui n’a pas attendu l’invasion de l’Ukraine pour se mettre à insulter Poutine.

Il arrivait à peine au pouvoir qu’il le traitait de tueur, en réponse, il est vrai, à une question de journaliste lui demandant de dire s’il acceptait de qualifier le président russe de tueur. On a appris plus tard qu’en fait il avait appelé Poutine pour lui présenter des excuses. Il faut croire que celles-ci avaient été acceptées, puisque les deux hommes se sont quelque temps plus tard rencontrés à Genève, et qu’ils ont semblé alors être dans des termes à peu près convenables. On peut être sûr qu’il n’en sera rien cette fois-ci, que probablement les deux hommes ne se verront plus, sauf peut-être en vidéoconférence, et pour des cas de force majeure. En attendant, la rupture des relations diplomatiques entre leurs deux pays, entre autres pour langage inapproprié de la part de l’un des deux dirigeants, est une hypothèse à ne pas écarter, les Russes ayant déjà dit que les chances de leur amélioration ont plutôt tendance à s’amenuiser. Tout cela donne à penser que même si l’insulteur faisait l’effort en quelque sorte surhumain d’appeler l’insulté pour lui faire ses excuses, le plus probable est que ce dernier ne répondrait pas au coup de téléphone. C’est d’ailleurs quelque chose que les Russes ont convenu de faire : ils ne répondent plus aux appels de leurs homologues américains, quels qu’ils soient. Tant que les Américains pouvaient les joindre, ils étaient à même d’empêcher la «guerre par erreur» avec eux d’éclater. Mais maintenant qu’ils ne le peuvent pas, ils ont peur que les Russes réagissent par excès à l’une ou l’autre de leur provocation, et en viennent à commettre l’irréparable, à envoyer par exemple un missile sur l’une ou l’autre de leur formation, bien entendu sur la base d’une interprétation tout à fait erronée d’un geste de leur part. Cette éventualité peut parfaitement se produire après le speech historique de Varsovie. Il suffirait pour cela que les Russes croient vraiment que l’intention de leur président est bien de manquer de respect au leur, et en viennent après cela à se saisir de la première occasion suffisamment ambigüe qui se présente pour lui faire justice.

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