Fort de ses succès à l’élection présidentielle et législatives, le Rassemblement National récuse plus que jamais l’union des droites voulue par le parti d’Éric Zemmour, Reconquête !. Certes, Marine Le Pen a perdu l’élection présidentielle, mais elle a vaincu tous ses adversaires pour se hisser jusqu’au second tour, pour la deuxième fois d’affilée. Le RN est également le second parti avec le plus de députés à l’Assemblée Nationale, après le parti du président Emmanuel Macron, Renaissance. Le nouveau statut du RN a confirmé pour certains de ses cadres que la stratégie de rejet du mouvement d’Éric Zemmour était la bonne et que la tendance «sociale» initiée par Marine Le Pen à la tête du parti à la flamme était la bonne. Or, l’élection triomphale de Jordan Bardella, plus clairement nationaliste inquiète. «Nous voulons réunir tous les Français», a réaffirmé le député RN du Nord, Sébastien Chenu. Avec Jordan Bardella à la tête du Rassemblement National, certains de ses adversaires reprochent au poulain de Marine Le Pen une ligne trop identitaire. En estimant que la théorie du «grand remplacement» pointe «une réalité», en restant ouvert aux déçus du camp d’Éric Zemmour, le jeune président du parti à la flamme est soupçonné de perdre de vue la ligne plus sociale du «marinisme». Sébastien Chenu, membre du bureau exécutif du RN, a de nouveau voulu être clair : «Si Reconquête ! pense que l’union des droites c’est l’avenir, ils se mettent le doigt dans l’œil». Le député du Nord affirme que «l’urgence, c’est l’alternance». «Pour la construire, que faut-il ? Se rabougrir en faisant l’union des droites ou s’élargir en parlant à tous les Français ?». L’élu du Nord estime aussi que la «géographie électorale» qui dessinerait deux électorats, celui de la gauche et de la droite, est «dépassée» : «Nous voulons réunir tous les Français». La veille, Guillaume Peltier, vice-président exécutif du parti Reconquête !, réaffirmait sa volonté d’une union des droites. «Chaque jour, nous tendrons la main. Je lance un appel à tous les LR, à tous les RN. Ils ont pour les uns 62 députés et pour les autres 89, c’est mieux que nous, concède-t-il. Mais notre objectif doit être d’atteindre 289 députés. S’opposer pour s’opposer n’a aucun sens. Demain, il faut gouverner la France pour sauver notre patrie». Toutefois, il n’est pas étonnant que Chenu se tienne vent debout contre une alliance avec Reconquête ! et qu’il refuse l’éventualité de voir son parti glisser à nouveau vers un nationalisme plus «dur», lui qui vient de la droite traditionnelle et qui n’a viré de bord qu’après que Marine Le Pen ait largement lissé le parti fondé par son père en 1972. Il fait partie de ceux, comme le nouveau président du RN, qui n’auraient probablement jamais rejoint le parti d’extrême-droite si Jean-Marie Le Pen était toujours à sa tête. Reste à voir si Bardella, élu à plus de 85 % des suffrages, tiendra la même ligne que celle qui lui a précédé ou si fort de son plébiscite se sentira en droit de durcir le discours du RN et de se montrer plus tranchant sur les questions identitaires, se rapprochant ainsi de la ligne de Reconquête !, au grand dam de ceux qui militent pour un RN social.