Parce qu’ils n’ont pas été balayés aux élections du 8 novembre, comme ils le craignaient, et qu’ils ont même pu réaliser l’exploit de garder le contrôle du Sénat – peut-être seulement avec une voix d’avance, un siège restant en effet en compétition, celui de la Géorgie – dans les mêmes termes que lors de la législature précédente, les démocrates n’ont pas hésité à se poser en vainqueurs de cette échéance. N’ayant perdu de plus que de peu la majorité à la Chambre des représentants, avec moins d’une dizaine de sièges, ils en sont déjà à se projeter aux élections de 2024, avec l’intention de les remporter. Pendant le décompte des voix à travers les Etats-Unis, ils se sont intéressés, du moins là où leurs chances de gagner sont réduites, en premier lieu à l’identité politique de l’heureux élu républicain. Et alors, de deux choses l’une : ou bien ce dernier est un proche de Donald Trump, et ils ont perdu sans conteste possible la partie ; ou bien il n’avait pas reçu auparavant le soutien, ou la bénédiction de Trump, et dans ce cas, ils n’ont perdu qu’à moitié. A ce compte, il se pourrait bien qu’ils aient gardé sans le savoir également le contrôle de la Chambre (the House), pour parler comme les Américains.
De sorte qu’ils s’estiment en droit d’envisager les élections qui viennent avec un surcroît d’optimisme. Sans doute leur victoire aurait-elle été bien plus grande si au vu des résultats de ces élections, Trump avait pris la décision de ne pas concourir à la présidentielle de 2024. Or il a fait le contraire, une semaine seulement après les élections, et alors même que tous leurs résultats n’étaient pas disponibles, comme si les républicains les avaient remportés à une écrasante majorité. Mais si réellement, comme disent les démocrates, Trump avait fait perdre aux républicains ces élections, leur intérêt leur commanderait de favoriser sa candidature non de faire campagne contre elle. De là le soupçon que ce qu’ils craignent ce n’est pas tant la candidature de Trump, qui après tout n’est pas leur affaire, que celle de Biden, qui lui aussi a annoncé non pas certes sa candidature, mais son désir de se représenter, au motif que les démocrates ont failli remporter les élections de mi-mandat. La réalité, c’est que les démocrates ne veulent pas que Biden se représente. Ce serait plus facile de le lui faire entendre si les républicains eux non plus s’opposaient à la candidature de Trump. De leur point de vue, Trump et Biden font la paire. S’ils se représentent, ce sera ensemble. Et s’ils ne le font pas, ce sera de même. Toutefois, ce calcul est déjà à l’eau, puisque Trump a annoncé sa candidature sans que cela soulève un tollé chez les républicains. Il est vrai qu’il s’en est trouvé quelques républicains qu’ils lui ont conseillé d’attendre que tous les résultats soient disponibles avant de prendre sa décision. Tous les résultats, cela veut dire patienter jusqu’à l’après-26 décembre, date de tenue du second tour de la sénatoriale de Géorgie. Une façon polie de dire à Trump qu’il n’est peut-être pas le meilleur candidat pour eux en 2024. Qu’ils pensent déjà à quelqu’un d’autre, au gouverneur de Floride par exemple, Ron DeSantis, qui a été réélu triomphalement sans être un de ses fans déclarés. Pour les démocrates, la candidature de Trump est d’autant plus indésirable qu’elle fait craindre celle de Biden, à la victoire duquel ils ne croient pas en 2024, même si lui-même croit que c’est grâce à lui qu’ils ont pu limiter les pertes dernièrement.