L’hiver est de retour : dès que les premiers flocons sont annoncés ou tombent, une armée d’engins est prête à «combattre» la neige et la glace sur la plupart des grands axes routiers. Leur arme : le sel, un déglaçant pratique et peu coûteux mais qui pollue durablement les écosystèmes.
Aux Etats-Unis, le sel apparaît sur les routes du New Hampshire en 1938. Dès l’hiver 1941-1942, séduits par son faible coût et son efficacité, les pouvoirs publics en déversent déjà 5 000 tonnes à travers le pays. Depuis, l’augmentation est exponentielle et l’on estime qu’aujourd’hui, rien qu’aux USA, 20 millions de tonnes de sel (60 kilos par tête) sont répandues chaque année sur les routes.
C’est un sel gemme extrait du sous-sol où les océans préhistoriques, en s’évaporant, ont laissé de gigantesques dépôts. Sa composition chimique est proche de celle du sel de table. L’Ohio, le Michigan, New York, le Kansas et la Louisiane, notamment exploitent d’énormes mines de sel.
Le sel, ou «chlorure de sodium», est en effet un excellent déglaçant. Saupoudré sur la glace, il la disloque et la rend soluble car les ions sodium et chlorure inhibent l’agglomération des molécules d’eau et donc la formation de la glace. C’est le phénomène de dépression du point de congélation, qui abaisse le seuil de température de congélation. Ainsi, Il prévient la formation de verglas jusque vers -8° C. Et le sable ? Le sable, de moins en moins utilisé, permet d’augmenter l’adhérence des véhicules sur la neige sans pour autant la faire fondre.
Contrairement aux messages rassurants des professionnels du salage qui considérent que le sel affecte très peu l’environnement et retourne in fine à la mer, les millions de tonnes de sel déversées chaque année sur l’environnement ont des conséquences notables et sérieuses au point que les risques sanitaires et écologiques ne peuvent plus être ignorés.
Le sel pollue l’eau
Une étude publiée début 2018 recense que 37 % des zones froides et humides du nord-est des USA voient leur salinité, principalement imputable au sel répandu sur les routes, augmenter chaque année depuis 50 ans. Et les sources d’eau souterraines sont aussi menacées comme le montre une étude plus ancienne menée dans la région du Dutchess County, (Etat de New York) : 48 % des 125 puits analysés dépassaient les seuils prescrits par l’EPA, et 20 % avaient des niveaux de concentration de sodium dangereux pour les personnes souffrant de tension artérielle.
Pour Paul Gallay, président de Riverkeeper et professeur associé de l’Earth Institute, «le sel n’est rien moins qu’une bombe à retardement pour l’eau douce. Les études montrent que le sel répandu il y a plusieurs décennies sur les routes, s’étant infiltré dans les eaux souterraines, commence à remonter dans les eaux de surface, d’où l’augmentation des concentrations observée».
Christophe Magdelaine / notre-planete.info