Salah Oudahar est de cette veine de poètes qui s’est mis à l’écriture par passion et amour des mots.
Par Lounès Ghezali
La poésie naît de l’éternelle interrogation sur la vie. Par sa sensibilité profonde, l’artiste ou le poète n’arrêtera jamais sa tentative de créer ce monde proche de ses rêves. Celui qui serait bâti sur les folies de ses souvenirs ou de son imagination. Seuls les mots peuvent remplir la vie du poète y compris quand celle-ci est bien pleine, c’est-à-dire loin de celles faites d’ennuis et de dégouts. Salah Oudahar est de cette veine de poètes qui s’est mis à l’écriture par passion et amour des mots. Au-delà de ses thèmes variés mais profondément empreints de nostalgie, on y lit presque pour ainsi dire, une sorte de confession involontaire. Des éclairages sur sa vie passée à Tigzirt… «Le cap Tedlès plonge dans la mer/ Le surgissement du matin/ La maison où je suis né / Témoin du temps» … Un peu comme au jeu du miroir, de petits sautillements narratifs rappellent ses premiers émois, les premières choses vues. Toute cette panoplie de souvenirs qui nichent à la lisière de la mémoire. Ceux qui surgissent à chaque fois que le désir de retourner à l’enfance se fait sentir. A chaque envie de chevaucher le temps et toutes ses intrigues, pour retourner à l’innocence des premiers instants de vie.
Dans ce recueil intitulé «Les témoins du temps et autres traces», publié aux éditions «A plus d’un titre» en France, Salah Oudahar étale des lieux outragés par le destin… «Les pierres ne sont pas muettes/ Pour qui parle la langue du silence…» Ces lieux, à eux seuls, racontent des histoires et pondent des souvenirs. Ils sont les seuls gages d’éternité. Mais parfois l’auteur glisse sa plume vers les traces éphémères. Celles vagabondes ou celles des vagues où la mer justement est omniprésente. Salah Oudahar, comme tout poète, se contente souvent d’un petit rien mais capable de produire l’enchantement. Capable de produire dans l’esprit cette féconde inspiration.
En plus des lieux, l’enfance, l’exil, il y a cette obsession du temps pour dire que, quel que soit le poids du rêve, le monde demeurera toujours avec sa part de cruauté pour l’Homme. Dans ce recueil, Salah Oudahar peint néanmoins les choses avec réalisme. Il tente de nouer des faisceaux malmenés par l’inlassable et néanmoins cruel souverain : le temps. Il peint toutes ces choses qui passent dans une antériorité très signifiante. Quelquefois, en plus de ces poèmes simples en apparence mais nimbés de quelques marques énigmatiques, des photos se déploient comme une continuité narrative. Elles donnent du sens aux vers qui, eux, suivent de temps en temps, des méandres déroutants. Ces photos mettent une sorte de dualité entre les petites folies du poète et le dur démenti de la réalité. Ce livre, en plus de son format agréable et dépouillé, peut se lire comme une petite saga autobiographique. Une autobiographie à la cadence et aux fluctuations du poète. «Les témoins du temps et autres traces», recueil de poèmes de Salah Oudahar sorti aux éditions «A plus d’un titre» en France.
L. G.