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jeudi 28 mars 2024

Pelosi provoque l’ire de Pékin

Les responsables américains font semblant de ne pas comprendre pourquoi les Chinois prennent si mal la visite projetée de la troisième des leurs dans l’ordre de la préséance, Nancy Pelosi, la représentante de la Chambre des représentants, à Taiwan, une de leurs provinces, et n’hésitent même plus à parler de recourir à la force pour l’empêcher, ce qui à première vue semble insensé. A l’heure où ces lignes sont écrites, cette visite n’a pas encore eu lieu. Mais si l’on devait se risquer à des conjectures à son sujet, on aurait plus de chance de tomber juste en pariant sur sa réalisation que sur son abandon. S’il s’était agi d’un autre que de Pelosi, peut-être le doute aurait été permis jusqu’au dernier instant, c’est-à-dire jusqu’au retour à Washington du fauteur de tension. Mais s’agissant d’elle, dans son genre une dame de fer, les chances qu’elle se laisse impressionner par les mises en garde chinoises sont minimes. Il semble bien que si elle n’a pas fait état de l’escale taïwanaise dans l’itinéraire rendu public, c’est seulement pour des considérations sécuritaires. C’est juste par mesure de précaution autrement dit, dans la crainte que les Chinois se laissent aller à quelque action dépassant leurs intentions réelles.

Le plus probable, donc, est que la visite aura lieu, la première de ce niveau depuis celle d’un lointain prédécesseur de Nancy Pelosi, un certain Newt Gingrich, mais qu’elle ne provoquera aucune réaction militaire de la part des Chinois, aussi grande que puisse être leur irritation. Ils avaleront celle-ci, se disent les Américains à eux-mêmes, lui réservant le même sort qu’à celle de 1997, qui elle aussi avait paru les déborder. Il y a le caractère intransigeant de la visiteuse, soit, mais il y a autre chose en l’occurrence, d’un intérêt vital à la fois pour elle et pour son camp, ce sont les élections de mi-mandat de novembre, qu’il ne leur faut absolument pas perdre, sous peine d’une mort politique. Une défaite devant des républicains dans une bonne mesure encore sous influence de Donald Trump, qui compte se représenter, est assurée si une démocrate de premier plan comme la présidente de la Chambre des représentants annule une visite à Taïwan juste pour éviter de provoquer l’ire de Pékin. Le vin est tiré, il faut le boire. Ayant été question de cette visite, il faut maintenant s’y mettre, quoi qu’il puisse en résulter, dût l’armée chinoise envahir Taïwan, comme en février dernier l’armée russe avait envahi l’Ukraine. D’ailleurs, quand bien même il n’en aurait pas été question, elle s’imposerait dans une tournée asiatique de Pelosi, dont l’objectif premier est de donner du cœur au ventre aux alliés des Etats-Unis dans une région où l’épouvantail convenu est la Chine. Le plus menacé de ces alliés étant Taïwan, le but recherché ne serait pas atteint si le périple ne comportait pas un détour par l’île en danger de retourner dans le giron de la Chine continentale, la seule que d’ailleurs reconnaissent les Etats-Unis eux-mêmes. La Russie a envahi l’Ukraine dès lors qu’elle a acquis la conviction qu’elle était en passe de devenir une terre de l’Otan. La Chine envahira à coup sûr Taïwan si celle-ci proclame son indépendance. Or toute visite que lui fait un haut responsable américain est un encouragement insidieux en ce sens. Pelosi n’a pas encore posé pied à Taïwan que déjà des parlementaires britanniques projettent de s’y rendre à leur retour.

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