Les poursuites en diffamation du Maroc contre des ONG et médias français ayant révélé ou dénoncé le recours par Rabat au logiciel d’espionnage Pegasus ont été déclarées vendredi irrecevables par la justice française.
Par Mahi G.
Le tribunal correctionnel de Paris a rendu dix jugements déclarant l’irrecevabilité des citations directes contre «Le Monde», Radio France, France Media Monde, Mediapart, «L’Humanité», Forbidden Stories et Amnesty International.
Les décisions s’appuient sur un article de la loi française de 1881 sur la liberté de la presse, qui «ne permet pas à un Etat, qui ne peut pas être assimilé à un particulier au sens de ce texte, d’engager une poursuite en diffamation».
A l’audience du 26 janvier, la procureure avait demandé au tribunal d’appliquer une jurisprudence «constante» dans ce domaine, citant des décisions récentes de la Cour de cassation, la plus haute juridiction de l’ordre judiciaire français.
Le Maroc a été accusé l’été 2021 d’avoir utilisé Pegasus, logiciel conçu par la société de l’entité sioniste «NSO», après une vaste enquête menée par un consortium de 17 médias internationaux sur la base de données obtenues par l’organisation Forbidden Stories et par Amnesty International.
Le logiciel Pegasus permet, une fois installé dans un téléphone mobile, d’espionner l’utilisateur de l’appareil, accédant à ses messageries, ses données, ou activant l’appareil à distance à des fins de captation de son ou d’image.
A rappeler que des organisations de défense des droits de l’Homme et des professionnels des médias marocains avaient récemment demandé aux
présidents des deux chambres du Parlement du royaume,
de former une mission pour enquêter sur le scandale du logiciel «Pegasus» utilisé par le Maroc pour espionner des personnalités publiques locales et étrangères, y compris des chefs d’Etat.
Maroc : l’accélération du rythme de normalisation, une «véritable menace» pour le pays
L’accélération du rythme de la normalisation entre le Maroc et l’entité sioniste est une «véritable menace» pour le Royaume, et tout effort visant à contrecarrer ce plan constitue une «bataille cruciale», selon le mouvement marocain «Al Adl Wal Ihsane».
Dans un entretien au site d’information «Arabi21», le responsable des relations extérieures du mouvement, Mohammad Hamdaoui, a souligné que la normalisation avec l’entité sioniste constitue «une menace pour le Maroc, plus qu’elle ne l’est pour la Palestine, en raison des dimensions dangereuses qu’elle a prises, notamment les tentatives persistantes d’inculquer la pensée et la culture sionistes au sein de la société marocaine pour oblitérer son identité (…)».
Et d’ajouter : «La bataille contre l’entité sioniste est cruciale et nécessite une grande vigilance de la part des forces vives de la société et de la part de l’ensemble du peuple (marocain) en vue de contrecarrer ces plans destructifs».
S’agissant des mouvements de protestation que connaissent plusieurs villes marocaines, Mohammad Hamdaoui a déclaré qu’«il est difficile à ce stade de prédire l’ampleur des conséquences de la grogne sociale actuelle, compte tenu du désespoir qui a gagné de larges franges de la société». Il a relevé que «ce sentiment s’est accru au fil des jours en raison de la baisse du pouvoir d’achat, la précarité touchant des secteurs névralgiques, tels que la Santé et l’Education et le manque d’opportunités d’emploi, qui a conduit à l’augmentation des taux de chômage et de criminalité, et en raison aussi de l’absence de tout plan de développement sérieux susceptible de s’attaquer aux principaux déséquilibres».
Et en réponse à une question sur la possibilité de changement au Maroc, Hamdaoui a dressé un tableau assez sombre de la situation. Il a dit que «jusqu’à nouvel ordre, il n’y a pas de volonté politique pour mettre le pays sur la bonne voie de la démocratie, et que tout ce qui se passe actuellement n’est qu’un effort continu pour instaurer plus d’autoritarisme et de répression à l’encontre des voix appelant au respect des droits de l’homme».
Dans ce contexte, il a mis en exergue «le bilan des violations massives des droits de l’homme, telles que la condamnation injuste de juristes et professionnels des médias, et avant eux, des militants du Rif qui revendiquaient leur droits de vivre dignement et autres».
Mohammad Hamdaoui a évoqué également la menace qui pèse sur le Maroc en raison de «l’exacerbation de la corruption». Il a souligné que le premier pas dans tout traitement est «une prise de conscience réelle et positive de cette menace, et de travailler pour conjuguer tous les efforts afin d’arrêter l’hémorragie de l’économie nationale causée par la corruption, le gaspillage, le pillage, la mauvaise gestion, la fuite des compétences, le sentiment d’injustice et les violations des droits de l’homme».
M. G.