L’Opéra d’Alger a vibré dimanche soir sous les rythmes de la musique kabyle. Organisé par l’Opéra d’Alger Boualem-Bessaih, en collaboration avec l’Office national des droits d’auteur et des droits voisins (ONDA), cette soirée en hommage au doyen de la chanson algérienne d’expression kabyle, Akli Yahiaten, a fait drainer un public nombreux de différentes régions du pays.
Par Abla Selles
Dans une atmosphère des grands soirs, le public de l’Opéra d’Alger a réservé un accueil triomphal à Akli Yahiaten qui devait d’abord assister en spectateur aux différentes reprises de ses œuvres par les voix étoffées d’Abbas Nait Rzine et Farid Ferragui, pour retrouver ensuite la scène et interpréter quelques-uns de ses titres sous les salves d’applaudissements et les youyous nourris du public.
Les deux ténors ont été soutenus par quelques choristes et une quarantaine de musiciens de l’Orchestre symphonique de l’Opéra d’Alger sous la direction du Maestro Lotfi Saidi.
Dans le mode zidène, Abbas Nait Rzine, au Oud, a interprété, avec une voix présente, les pièces «Ch’hal ima hadren felli», «I nezra mazal anzar», «Jahegh», et «Azrigh azzine dhi Michli», pour conclure avec une de ses compositions montée sur une cadence à trois temps.
Se produisant pour la première fois de sa grande carrière avec un orchestre symphonique, Farid Ferragui, très applaudi par l’assistance, a pris le relais, entonnant entre autres pièces, «At’khel’sadh aynour’thetch’idh», «A thamurthiw, thamurth idurar», «El firak vezzaf yew’âar» et «Dhaâwassou L’waldine thew’âar».
Placée à l’avant scène, la section des percussionnistes de l’Orchestre symphonique de l’Opéra d’Alger a brillé de maîtrise et de professionnalisme, Réda Saidji à la derbouka notamment, très apprécié par le public, qui a passé en revue toutes les techniques de jeu permettant la production de différentes sonorités rythmiques.
Après sa distinction, Akli Yahiaten, qui est apparu sur scène pour recevoir le trophée honorifique devant un public debout, a entonné avec beaucoup de métier, les pièces «Selliw fer’Rsoul Mohamed», «Rouh ammi yifik Rabbi», «Yal’menfi» et «Ya saknin ledjbel», pour voir son petit-fils Akli, monter sur scène pour rendre un couplet de la fameuse pièce «Jahegh» qui réveille l’amour de la Patrie chez tout Algérien en exil. Visiblement ému, l’artiste a salué d’un geste le public nombreux, venu lui rendre hommage pour sa longue et fulgurante carrière, passée à faire entendre la voix de l’Algérie dans ses plus pénibles circonstances, notamment durant la période coloniale. Né en 1933 à Aït Mendès Boghni (Tizi Ouzou), Akli Yahiaten s’est exilé en France où il fera la rencontre d’illustres compositeurs et chanteurs de son époque, à l’instar de Slimane Azem, Zerrouki Allaoua et Cheikh El Hasnaoui qui aiguiseront sa passion pour la chanson. Préférant le luth (Oud) et la mandoline, l’artiste a composé et interprété plusieurs chansons dont notamment «Ay-axxam» (La maison), chanson nostalgique à succès, traduite en espagnol.
D’autres grands titres jalonneront sa carrière, avec notamment les pièces «Thamurthiw», «Jahagh bezzef da meziane», ou encore «Yedja yemas».
«Ya El Menfi», une de ses chansons-tube, reprise par le trio Mami, Khaled et Rachid Taha ainsi que par le chanteur libanais Alaa Zalzali, évoque les souffrances des immigrés algériens et les victimes de la déportation en Nouvelle-Calédonie.
En 2017, Akli Yahiaten a été décoré de la médaille de l’Ordre du mérite national au rang de «Achir».
A. B.