Si le calendrier tel qu’annoncé par l’ONU est respecté, ce qui normalement devrait se produire, dès demain 5 février la Libye sera dotée à Genève d’un nouvel exécutif intérimaire, en lieu et place du Gouvernement d’Union nationale (GNA) dirigé, depuis son installation à Tripoli en mars 2016, par Fayaz al-Serraj. A un gouvernement provisoire ou intérimaire succèderait de la sorte un gouvernement provisoire lui aussi. À cette différence près cependant, et elle n’est pas négligeable. C’est qu’au nouveau gouvernement une limite temporelle précisée est fixée avant même qu’il ne voie le jour, le 24 décembre 2021, le jour où sont censées se dérouler les élections présidentielles et législatives marquant la fin théorique de la crise libyenne. Cet exécutif de transition ne pourra pas contracter des traités internationaux, sous prétexte qu’il est légitime et reconnu, régulier serait un terme plus exact, comme avait pu le faire le GNA sans en référer à personne. Il n’existe pas de raison de penser que ce calendrier ne soit pas tenu, même s’il peut arriver que les élections prévues pour le 5 au sein du Forum du dialogue libyen, réuni en ce moment à Genève sous l’égide de l’ONU, ou plus exactement sous la férule de Stephanie Williams, pourtant elle-même intérimaire, durent un peu plus longtemps que prévu.
Dans les deux listes de candidats, l’une des membres du nouveau Conseil présidentiel, parmi lesquels il faudra choisir 3, et l’autre au poste de Premier ministre, des noms sont plus connus que les autres. Emergent notamment celui de Fathi Bashagha, l’actuel ministre de l’Intérieur, et celui de Salah Aguila, le président du Parlement de Tobrouk. Il ne serait pas étonnant eu égard à leur renommée que l’un prenne la tête du Conseil présidentiel, et qu’à l’autre revienne le poste de Premier ministre. Comme il avait été question dans un passé encore récent du remplacement d’al-Serraj par Bashagha, on peut penser que ce dernier est le mieux placé pour diriger le Conseil présidentiel, qui sera composé de trois membres. Dans ce cas de figure, Aguila Salah, un homme de l’est, serait en bonne position de présider le gouvernement. Ce ne sont là toutefois que des hypothèses, car les deux listes n’ont pas été publiées. Il est quelqu’un en tout cas dont il a beaucoup été question par le passé, davantage que Fathi Bashagha et Aguila Salah, qui ne figure dans aucune liste, et qui de ce fait semble condamné à disparaître de la scène libyenne dès la prise de fonction du nouvel l’exécutif, c’est bien sûr le maréchal Khalifa Hafter. On ne sait trop quel avenir sera le sien, si même il en a un. A vrai dire, on n’est pas plus avancé s’agissant d’al-Serraj, encore qu’il soit arrivé à ce dernier de parler de sa démission, une intention non suivie d’effet mais qu’en son temps Alger n’avait pas manqué de saluer. A vrai dire, il n’y a pas qu’al-Serraj et Haftar pour se réfugier dans le silence pour l’heure, au point de faire douter de la viabilité même de la feuille de route onusienne en cours de concrétisation. Les acteurs étrangers, dont le rôle dans l’affaire libyenne ne saurait être sous-estimé, ne se montrent guère diserts eux non plus quant à leurs intentions pour l’après-5 février. Retireront-ils bientôt leurs soldats et mercenaires comme cela leur est instamment demandé par l’ONU, et depuis quelques jours aussi par la nouvelle administration américaine, ou n’en feront-ils rien estimant qu’il ne s’était rien passé à Genève du 1 au 5 février, et qu’en conséquence les choses en sont au même point en Libye ? Telle est la question.