L’auteur et conteur professionnel du patrimoine culturel algérien et universel, Seddik Mahi, continue de transmettre oralement des contes pleins de messages de fraternité, de paix, tout en appelant à la préservation des valeurs humanitaires.
Par Abla Selles
Passionné de contes depuis son jeune âge, Seddik Mahi œuvre à chaque fois à démontrer la richesse du patrimoine oral de notre pays, tout en s’ouvrant sur d’autres cultures. En effet, ce conteur a présenté, samedi à Alger, quatre contes allégoriques, portés par la voix apaisée et la gestuelle lente et narrative de ce pèlerin invétéré, dévoué par son art d’entretenir la bonne parole, à pérenniser et transmettre la mémoire ancestrale, «garante», a-t-il tenu à rappeler, de l’«identité algérienne».
Accueilli au Musée public national maritime dans le cadre du Mois du patrimoine (18 avril-18 mai), le conteur a d’abord éveillé l’intérêt du public à travers quelques expériences qu’il a restituées, y mettant d’entrée le ton vocal adéquat à ce genre d’exercice, dont la première approche consiste à «ramener l’auditoire dans son univers pour le préparer à vivre les événements de la trame et saisir la morale du conte».
Dans des atmosphères empreintes de solennité, Seddik Mahi a déclamé successivement les contes algériens «La légende oubliée des mouettes», un conte mis à jour pour la circonstance dans ce lieu dédié au rapport de l’homme avec la mer, «El Habra bent Es’Sbaâ», sur les ravages émotionnels créés par la parole blessante, «El Ghoula bent El Ghoula», dédié à la femme raisonnable et sensée, ainsi que «Le petit poisson d’or» tiré d’une histoire universelle au titre éponyme du Russe Alexandre Pouchkine.
Seddik Mahi a expliqué que «la parole», déclamée ou écoutée, constituait un moyen «purificateur et protecteur» aux vertus multiples : «thérapeutique», car elle permet d’«exorciser tous les maux enfouis en soi» par le cumul des déceptions dans la vie, et «salvatrice» car elle entretient la mémoire ancestrale et «immunise le récepteur de tout risque d’égarement intellectuel ou culturel».
Recevant la distinction honorifique du Musée public national maritime, le narrateur a mis en avant l’importance du conte populaire, rappelant que l’occupant français a, dès 1830, mis en pratique sa politique de déculturation, en procédant à la «confiscation des contes populaires» et répandre d’autres histoires aux origines essentiellement françaises.
Né en 1960 à Sidi Bel-Abbès, Mahi Seddik, de son vrai nom Meslem Seddik, œuvre depuis plusieurs années à promouvoir et à ressusciter la tradition orale des «Gouals» (conteurs).
Le conteur a animé, ces dernières années, à la faveur des festivals organisés à travers l’Algérie, de nombreux espaces et ateliers consacrés au conte populaire. Il s’attache aussi à la collecte des récits et contes populaires pour les produire sous forme théâtrale ou les publier.
Parmi les contes puisés du terroir algérien inscrits à son répertoire, «Hdidouène wel Ghoula», «Rmida et Ali», ainsi que d’autres contes sur le roi numide Syphax, l’Emir Abdelkader ou encore «Moula Moula, l’oiseau de bonne augure», un des rares recueil de contes algériens recueilli auprès des enfants de Tamanrasset et publié en 2019 avec d’autres contes.
A. S.