Les heurts se multiplient en Iran et visiblement le régime islamique semble inquiet de la tournure que prennent ces derniers jours les évènements jusqu’à faire réagir le guide suprême d’Iran, Ali Khamenei, qui a exhorté cette semaine les manifestants protestant contre les pénuries d’eau dans le sud-ouest du pays à ne pas faire le jeu des «ennemis», après la mort d’au moins quatre personnes. Le 15 juillet, des manifestations ont en effet éclaté dans plusieurs villes de la province du Khouzestan, frappée depuis fin mars par la sécheresse, où au moins trois personnes ont été tuées, ont indiqué les médias locaux. Jeudi dernier, une quatrième personne a été tuée et deux autres ont été blessées lors d’«émeutes» dans la province voisine de Lorestan, déclenchées «sous prétexte des problèmes d’eau au Khouzestan», a rapporté Iribnews, le site internet de la télévision d’État. C’est la première fois que des médias locaux évoquent des manifestations ou des victimes hors du Khouzestan depuis le début des tensions dans cette province qui abrite les principaux gisements de pétrole iranien. «Les gens ont exprimé leur mécontentement et en aucun cas nous ne pouvons le leur reprocher», a déclaré dans un communiqué publié sur son site internet, l’ayatollah Khamenei, reconnaissant que la question de l’eau était importante, «notamment avec le climat chaud du Khouzestan». Mais «l’ennemi cherche à tout utiliser contre la Révolution, le pays et les intérêts du peuple, il faut donc veiller à ne pas lui donner un prétexte», a-t-il lancé à l’adresse des habitants de la province, sans préciser de quel «ennemi» il s’agissait. D’après des médias et responsables iraniens, au moins trois personnes ont été tuées au Khouzestan, dont un policier et un manifestant, du fait d’«opportunistes et d’émeutiers» ayant tiré sur les manifestants et les forces de sécurité. Les médias iraniens n’ont pas précisé qui étaient les deux autres victimes. «Des tirs suspects ont été déclenchés par des éléments inconnus à Lorestan», a écrit Iribnews, ajoutant que «les forces de sécurité sont descendues dans la rue pour faire face aux émeutiers». Le site n’indique pas si les heurts ont opposé habitants et forces de l’ordre, mais affirme que la situation s’est «calmée». A l’étranger, la Haute-commissaire aux droits de l’homme, Michelle Bachelet, a accusé, dans un communiqué à Genève, les autorités iraniennes d’avoir violemment réprimé les manifestations contre les pénuries d’eau. Des groupes de défense des droits humains ont également accusé l’Iran d’un recours illégal à la force lors des manifestations, estimant que le bilan des victimes était plus élevé et dénonçant des restrictions imposées par les autorités sur l’accès à l’information. Amnesty International affirme avoir la confirmation de la mort d’au moins huit manifestants et passants, dont un adolescent tué dans la ville d’Izeh au Khouzestan, après que les autorités ont tiré à balles réelles sur les protestataires. Ces derniers jours, des médias émettant en persan depuis l’étranger ont fait état de manifestations réprimées par les forces de l’ordre, alors que les médias locaux ont dans un premier temps gardé le silence sur ces protestations. Ainsi, si le régime réagit face aux manifestations, ce n’est toutefois pas pour apporter des solutions aux problèmes auxquels est confrontée la population iranienne, surtout avec les lourdes sanctions américaines qui paralysent l’économie. Malgré tout, Téhéran continue de faire la fine bouche face à Washington et à attendre que les Américains tendent la main, alors que la population iranienne souffre chaque jour un peu plus de ses conditions de vie.