REGARD
Le temps des grands changements s’annonce dans la gestion des affaires économiques du pays. Si à ce jour, sous l’impact de la pandémie de Covid-19, les autorités n’ont fait que dans le «colmatage» des brèches, une réelle politique économique semble se dessiner en perspective. Le président de la République a clairement affiché son intention de réformer la législation intrinsèque aux affaires économiques, ce dimanche, en annonçant la révision prochaine de la loi sur la Monnaie et le Crédit et l’engagement d’une réflexion sur la création de mécanismes pour couvrir les risques de change encourus par les opérateurs économiques en raison de la dépréciation de la monnaie nationale.
Le chef de l’Etat a déclaré, dans ce contexte, que toutes les lois régissant les secteurs économiques doivent être révisées, citant particulièrement la révision de la loi sur la Monnaie et le Crédit. «Nous nous dirigeons aujourd’hui vers une économie ouverte sur le monde. Il faut que la loi sur la Monnaie et le Crédit soit révisée. Il faut aller vers une réforme bancaire et fiscale absolue et à fond», dira-t-il à ce propos.
En effet, on ne peut envisager une quelconque réforme, notamment bancaire, sans aller vers une révision de la «loi mère», celle de la Monnaie et du Crédit, qui dans le monde de la finance locale est considérée comme la «Constitution» qui régit toutes les autres lois. Instaurée par la loi 90-10 du 14 avril 1990, légèrement modifiée par ordonnance à trois reprises (2003, 2010 et 2017), cette loi a été introduite dans un contexte particulier de crise financière aiguë de la fin des années 80, et sous impulsion des institutions financières internationales, plus précisément celle du Fonds monétaire international (FMI), qui avait dicté ses lois à un pays au bord de la faillite. Pour les spécialistes, cette loi avait introduit pour la première fois en Algérie la rationalité et les règles de l’orthodoxie bancaire universelle, octroyant une plus grande autonomie au système bancaire et financier et une indépendance totale de la Banque d’Algérie, placée sous autorité du président de la République, chargée de la politique monétaire et exerçant distinctement du ministère des Finances relevant du gouvernement, chargé de la politique budgétaire. En plus de ses opérations d’émission de la monnaie, la Banque d’Algérie assure les conditions favorables à un développement harmonieux de l’économie, tout en veillant à la stabilité de la monnaie et au bon fonctionnement du système bancaire en respectant les règles prudentielles.
Ainsi, aucune réforme économique n’est possible sans celle du système bancaire et cette dernière ne peut voir le jour sans passer par la révision de la loi sur la Monnaie et le Crédit. Reste à savoir vers quelle nouvelle loi la finance nationale va s’acheminer, le contexte mondial a complètement été chamboulé par la pandémie de Covid-19, les rapports de force dans l’économie mondiale sont en passe de connaître un véritable chassé-croisé et les pays ont tendance à se recroqueviller, de plus en plus, dans des politiques économiques protectionnistes. Le retour de l’Etat-providence se profile avec son lot de règles et de lois, complètement différentes de celles connues depuis des décennies.
Les ateliers économiques que le Président compte organiser immédiatement après le référendum du 1er novembre prochain traceront sans doute les contours de la nouvelle politique économique du pays et surtout ceux de notre nouvelle loi sur la Monnaie et le Crédit. Wait and see…
Mourad Hadjersi