Si avant l’envahissement du Capitole par une foule entièrement acquise à Donald Trump, il tardait aux démocrates de voir ce dernier quitter la Maison-Blanche, cédant ce faisant sa place à l’un des leurs, Joe Biden, force est de constater qu’ils ne sont plus exactement dans le même sentiment aujourd’hui. Pour eux l’urgence n’est plus la même s’agissant de la même personne, d’autant qu’ayant épuisé tous les records, aussi bien ceux que lui offrait la légalité que ceux qu’elle lui interdisait formellement, il ne reste plus à celle-ci qu’à vider la place à l’heure prescrite. Pour autant qu’elle ne veuille pas être prise par la peau du cou et jeter hors des lieux comme un malpropre, un ultime affront qu’elle ne semble pas d’ailleurs particulièrement désireuse de subir. Si les démocrates pouvaient pourtant le retenir à sa place quelques jours de plus, ou même davantage, à vrai dire tout le temps dont ils ont besoin pour le mettre en accusation, le juger en long et en large, et finalement le destituer, c’est ce qu’ils conviendraient de faire. Car ce qu’il importe le plus après la violation du Capitole, ce n’est pas qu’il quitte la scène, mais qu’il ne puisse jamais y retourner. Un processus, mieux un impératif, une nécessité absolue pour tout dire, qu’ils ne peuvent mener à son terme faute de temps.
Ils s’y essayent malgré tout, car qui ne tente rien n’a rien, tout à l’espoir de caser les séquences de l’opération salvatrice dans le peu de temps qu’il reste d’ici le 20 janvier, dernier jour de Trump, et le premier de Biden, à la Maison-Blanche. Ce serait toutefois se tromper de croire que s’ils ont changé de priorité pour ce qui le concerne, c’est juste parce qu’ils ont fini par prendre toute la mesure du danger qu’il représentait, et pour eux et pour les Etats-Unis, à la vue de l’assaut donné sur le Capitole par des hommes de main à sa dévotion. Pour eux, il était devenu en quelque sorte l’homme à abattre dès lors qu’il a contesté la victoire de leur candidat. Ce qui, on s’en souvient, est advenu le jour même du scrutin présidentiel. On pourrait même dire avant, puisqu’il avait commencé à dénoncer la fraude dès les premiers votes exprimés. En déclarant dès ce moment que s’il perdait, ce serait par la faute de la fraude et des fraudeurs, il créait par avance les conditions qui le 6 janvier ont donné lieu à l’envahissement du Capitole et à la mort de cinq personnes. Il semble que ce soit dans l’intervalle que les démocrates aient changé de conception relativement à Trump. Avant le début de la présidentielle, l’idée qu’ils s’en faisaient était celle qu’avait formulée le premier d’entre eux, Barack Obama, suivant laquelle il ne fallait pas voir dans cet homme la cause des problèmes assaillant les Etats-Unis mais seulement leur symptôme. Cette formule impliquait que les problèmes non seulement préexistaient à Trump, mais qu’ils lui survivraient, peut-être aggravés, sûrement même, mais les mêmes quant à l’essentiel. Ils étaient là avant qu’il ne devienne président, et ils seraient encore là lui parti. Mais pour peu qu’on y pense, la formule veut également dire que ce sont eux, les problèmes, qui l’ont fait président des Etats-Unis. Ce sont eux qui l’ont fait élire. Il n’aurait pas été impossible donc qu’il le fasse réélire. Cette conclusion logique, les démocrates l’auraient repoussée de toutes leurs forces. C’est à elle que s’était accroché par contre Trump, qui a nié jusqu’à la possibilité de perdre.