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jeudi 28 mars 2024

Libye, vers une parodie d’élection ?

L’appel introduit par Seif Islam Gueddafi, suite au rejet de sa candidature par la Haute commission électorale libyenne, ayant été contre toute attente accepté par les autorités judiciaires de Sebha, on se demande comment il faut le prendre. Faut-il y voir un bon signe, le pouvoir judiciaire ayant prévalu sur le diktat de la force ? Ou plutôt un mauvais, en ce sens qu’à Sebha, où son dossier de candidature a été déposé, le candidat Gueddafi a des soutiens qui ailleurs lui auraient manqué ? Bien qu’il ne soit pas certain que le secrétaire général de l’ONU se soit posé ce genre précis de questions, le fait est qu’il y a deux jours, lors d’un débat sur la situation en Libye, il a exprimé des doutes sur la faisabilité de cette élection, mais également des craintes qu’elle aggrave  le cas d’un pays qu’on a déjà bien du mal à faire tenir sur ses pieds. Il serait souhaitable, a-t-il dit en substance, que celle-ci fasse partie de la solution au lieu d’ajouter aux problèmes existants. Il ne se serait pas exprimé de ce style s’il était certain que les conditions étaient réunies pour que les Libyens élisent leur premier président dans le calme et la transparence. L’ONU, dont le dernier envoyé spécial vient de donner sa démission, est en réalité dépossédée du dossier libyen. De par la volonté des puissances exerçant de fait une tutelle collective sur la Libye, et ce  depuis la chute de l’ancien régime, résultat obtenu au prix d’une intervention militaire de leur part, la machine électorale est lancée,  que rien ne semble en mesure d’arrêter. Une première liste de candidats a été rendue publique, comprenant des noms aussi controversés les uns que les autres, dans l’attente que les recours relatifs aux dossiers rejetés soient examinés par les juges. Une liste finale devrait en découler qui elle serait sans recours. Il n’est pas dit d’avance que Gueddafi s’y trouvera. Le plus probable au contraire est qu’il n’y soit pas, à cette différence que sa deuxième élimination ne serait pas  due à la force pure et simple, comme la première, mais à une décision prise par un tribunal. Il n’en reste pas moins que le fait d’envoyer une force armée faire le siège du tribunal de Sebha, pour empêcher son avocat de faire appel, montre bien de quelle élection il s’agit en l’occurrence. Celui qui la remportera, selon toute vraisemblance ce ne sera pas celui qui aura convaincu le plus d’électeurs, mais celui qui le jour « j » aura aligné le plus de forces, le plus de divisions pour ainsi dire. Comme il se trouve que le candidat fort à l’est n’est pas le même à l’ouest, le risque est grand que la Libye  se retrouve avec deux présidents à sa tête le soir ou le lendemain du 24 décembre. Et dans ce cas, on aura abouti non pas à sa réunification, mais à la consécration de sa division actuelle. Devant une telle perspective, on aimerait que les puissances à la barre dans les coulisses sachent comment remédier à une telle conséquence si d’aventure elle se produisait. Si elles ont forcé la main aux factions libyennes pour les amener à s’engager dans une élection prématurée, c’est  sans doute qu’elles ont déjà convenu de la suite. En particulier, elles doivent déjà savoir qui va la gagner. Dans leur esprit, en effet, ce qui compte ce n’est pas tant l’élection que ce qu’il serait possible de proclamer dans son sillage: la réunification de la Libye, détruite par elles-mêmes justement. Sortir de la division en Libye, même au prix d’une parodie d’élection. Tel du moins semble être leur objectif.

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