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mardi 28 mars 2023

Libertés

À la fin du mois d’août dernier, au moment du départ des dernières forces et personnels militaires d’Afghanistan, beaucoup craignaient qu’un retour au pouvoir des talibans ne marque la fin des quelques timides avancées qu’avait connues la cause des femmes dans le pays et que le peu de libertés dont elles bénéficiaient lui soit arraché. Pourtant, plusieurs instances internationales et même quelques chancelleries occidentales voulaient croire, ou du moins le feignaient, que le nouveau régime taliban pourrait se montrer plus «inclusif» et «modéré». Sans surprise, les fondamentalistes au pouvoir ont rapidement mis fin aux fantasmes occidentaux en retirant, en l’espace de quelques mois, aux citoyennes afghanes tous leurs maigres acquis. Et cette semaine encore, les talibans ont rejeté l’appel du Conseil de sécurité de l’ONU à revenir sur les restrictions imposées aux femmes afghanes, jugeant «sans fondement» les inquiétudes exprimées par la communauté internationale sur ces questions. Le Conseil de sécurité a appelé mardi dernier les talibans «à inverser rapidement les politiques et pratiques qui restreignent actuellement les droits humains et les libertés fondamentales des femmes et des filles afghanes», dans une déclaration adoptée à l’unanimité. Le texte des 15 membres du Conseil cite «l’imposition de restrictions qui limitent l’accès à l’éducation, à l’emploi, à la liberté de mouvement et à la participation pleine, égale et significative des femmes à la vie publique». En particulier, le Conseil de sécurité réclame au pouvoir taliban de rouvrir les écoles pour toutes les filles et exprime sa «profonde préoccupation» face à l’obligation faite aux femmes de se couvrir le visage dans les espaces publics et dans les émissions des médias. Dans un communiqué publié vendredi, le ministère afghan des Affaires étrangères juge les préoccupations du Conseil de sécurité «sans fondement» et «irréalistes», et «réaffirme son engagement» à garantir les droits des femmes afghanes. «Étant donné que le peuple afghan est majoritairement musulman, le gouvernement afghan considère que le respect du port du hijab islamique est conforme aux valeurs religieuses et culturelles de la société et aux aspirations de la majorité des femmes afghanes», ajoute le communiqué. Début mai, le chef suprême des talibans a émis un ordre selon lequel les femmes devaient se couvrir entièrement en public, y compris le visage, idéalement avec la burqa, un voile intégral doté d’une grille en tissu au niveau des yeux. Les restrictions imposées aux afghanes «décrivent un modèle de ségrégation sexuelle totale et visent à rendre les femmes invisibles dans la société», avait dénoncé, jeudi à Kaboul, le rapporteur spécial de l’ONU pour les droits humains en Afghanistan, Richard Bennett. La communauté internationale a fait du respect des droits humains, particulièrement pour les femmes, un prérequis dans les négociations sur l’aide et la reconnaissance du régime islamiste, arrivée au pouvoir en août dernier. Les nouvelles restrictions imposées aux femmes confirment la radicalisation des talibans, qui avaient initialement tenté de montrer un visage plus ouvert que lors de leur précédent passage au pouvoir entre 1996 et 2001. Ils avaient alors privé les femmes de presque tous leurs droits, leur imposant notamment le port de la burqa. Reste à voir si comme il y a vingt ans la communauté internationale détournera les yeux face à l’opiniâtreté des talibans qui pourraient, dans les mois et les années à venir, continuer à priver la population afghane de toujours plus de libertés, aussi infimes soient-elles.

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