La prise en charge des malades mentaux reste le parent pauvre du système de santé en Algérie. En plus de l’aspect sanitaire qui connaît bien de lacunes, des malades, dont la place est dans des centres psychiatriques, sont souvent réduits à errer notamment dans les grandes villes. Certains sont violents et présentent un danger pour autrui, d’autres sont abandonnés à leur sort et survivent dans des conditions lamentables. Hier, à l’occasion de la célébration de la journée mondiale de la santé mentale, un état des lieux a été élaboré et des propositions ont été faites. Le ministre délégué chargé de la réforme hospitalière, Smail Mesbah, a indiqué que l’offre de soins en santé mentale a connu, ces dernières années, « une nette amélioration », reconnaissant, toutefois, que « des défis restent à relever ».
De son côté, le sous-directeur chargé de la promotion de la santé mentale au ministère de la santé, Mohamed Chakal, a affirmé que son département s’est doté, en matière de textes référentiels, de « moyens qui permettraient d’améliorer le bien-être mental de façon conséquente, pérenne et conforme à la vision universelle, telle que préconisée par l’OMS ».
Cependant, des défis ont été identifiés, citant, entre autres, « l’inadéquation des structures existantes avec cette vision, le poids des tabous, idées reçues et autres à de nombreux niveaux, afin d’intégrer la notion de santé mentale comme une composante à part entière de la santé, la complexité du travail multisectoriel, et la place de la prévention, par rapport à celle du soin médico-psychologique proprement dit ». M. Chakal a jugé « nécessaire » de définir avec la plus grande précision les modalités de prévention et de prise en charge en matière de santé mentale afin d’élaborer le cadre réglementaire de l’offre de soins en santé mentale en Algérie. Ces modalités, a-t-il expliqué, « pourront être médicales, médico-psychologiques, socioprofessionnelles ou éducatives ».
Sur un autre plan, il a tenu à souligner que le lieu de résidence « ne doit en aucun cas être un motif de refus » des soins, particulièrement dans le cadre de l’urgence, plaidant pour la facilitation de l’accès à la scolarité et à la formation professionnelle pour toute personne atteinte de troubles mentaux selon des modalités adaptées aux différents cas. S’agissant des lacunes à combler, M. Chakal a cité une vingtaine dont principalement celles relatives à l’élaboration des textes d’application de la loi sanitaire en matière de modalités d’hospitalisation, à la mise en place des conseils juridiques dans les hôpitaux et services de psychiatrie, et à l’élaboration des normes en moyens et matériel pour l’ensemble des dispositifs de santé mentale. Il a mis l’accent, dans ce contexte, sur la nécessité d’actualiser et de généraliser le registre des patients mis en isolement ou sous contention, sur l’accueil des urgences et gestion des situations de crise et sur le développement des soins de santé mentale dans les structures de santé primaire. Outre les propositions des spécialistes, faut-il ajouter qu’à Alger, à titre d’exemple, des centaines de femmes et d’hommes malades mentaux nécessitent une prise en charge en urgence. Bizarrement, les services chargés de leur venir en aide ne se sont jamais manifestés. Pourtant, ces personnes vulnérables sont présentes à longueur d’année dans les principales rues et places de la première ville du pays.
Aomar Fekrache