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mercredi 22 mars 2023

Les Européens renâclent à payer en roubles

A l’instigation des Etats-Unis, qui ont déclaré une guerre économique totale à la Russie, et cela d’autant plus aisément que leurs échanges commerciaux sont modestes avec elle, les pays européens se sont hâtés de prendre contre elle des sanctions d’une sévérité sans pareille, tout en étant pleinement conscients des effets négatifs que cela aurait sur eux pris dans leur ensemble. Dans cette affaire, ils n’ont donc pas l’excuse de ne pas savoir, de s’être laissés entraîner par les Américains sur un terrain truffé d’embûches, où par la forces des choses ils ne pouvaient que tomber. Non, ils ont agi en pleine connaissance de cause, mais dans l’idée qu’en l’occurrence l’initiative leur appartiendra de bout en bout, confiants à la fois en leur suprématie économique et dans leur nombre. On peut se rendre compte aujourd’hui qu’en réalité ils n’ont pas prévu toutes les conséquences de leurs actes. Ils ont dû sans doute envisager la possibilité que la Russie réplique à leurs sanctions en arrêtant ses fournitures de matières premières, de gaz et de pétrole notamment, mais c’était pour l’écarter après un court moment de réflexion, dans la supposition qu’un pays aussi isolé n’allait pas aggraver son cas en rompant de son propre chef les liens qui lui restaient encore avec eux, ou plutôt, qu’ils lui laissaient encore avoir avec eux.

L’ensemble européen, après tout, est une superpuissance économique s’il est à l’échelle mondiale un nain politique. L’idée que les Russes leur demanderaient en fin de compte de payer en roubles leurs achats de gaz à l’évidence n’a pas dû leur effleurer l’esprit. Si quelqu’un avait attiré leur attention sur cette éventualité, ils se seraient moqués de lui. Payer en roubles le gaz russe ? Et puis quoi encore ? Mais c’est déjà assez qu’ils daignent
l’acheter ! C’est déjà trop de bonté de leur part ! Ils ont à cela d’autant plus de mérite qu’ils prennent le risque de mécontenter l’ami américain, qui lui n’aurait pas mieux demandé que de les voir s’en passer complètement. La première réaction des acheteurs européens de gaz russe, ce qu’ils sont à peu près tous, ce fut un rejet véhément, unanime, à la mesure de rétorsion russe. Pour preuve que celle-ci n’était pas improvisée, c’est qu’elle a été précédée de la publication de la liste des pays inamicaux envers la Russie. Un fait qui lui aussi est passé inaperçu par eux. On peut être sûr que depuis cette liste, qui ne compte que des pays européens, a été abondamment consultée. L’Allemagne, de tous le plus gros acheteur, l’Italie, la France, d’autres encore, ont aussitôt fait savoir qu’elles ne s’abaisseraient pas à payer en rouble, qu’elles résisteraient, qu’elles feraient bloc, qu’elles forceraient la Russie à battre en retraite, à leur céder son gaz dans les monnaies dignes d’elles : le dollar et l’euro. C’est que donc, leur ont répondu les Russes, vous voulez qu’on vous le donne gratis notre gaz. Serions-nous une société de bienfaisance ? Vous conviendrez avec nous que non. Par conséquent, ou vous nous payez en roubles, ou nous serons obligés de fermer le robinet, et des pans entiers de votre économie s’en trouveront à l’arrêt, en attendant qu’elle le soit en entier. Ce que la guerre elle-même n’a pas pu faire jusque-là, arrêter la fourniture de gaz, qui passe en partie par l’Ukraine, le refus de payer en roubles y parviendra sûrement quant à lui. Si jamais bien sûr les clients européens ne surmontaient pas leur répugnance à manier du rouble.

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