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mercredi 7 juin 2023

Le refus israélien qui est un aveu de culpabilité

On se demandait l’autre jour de quoi était morte précisément Shireen Abou Akleh. Est-ce d’être palestinienne, tout en étant journaliste à Al Jazeera, ou plutôt est-ce d’être américaine ? Sans doute avait-elle été tuée par l’armée israélienne pour être tout cela à la fois, de sorte qu’elle serait probablement encore en vie si une seule de ces composantes avait manqué à son équation personnelle. Mais la question que l’on s’était posée cherchait à dégager l’élément ayant scellé son destin ce 11 mai, 7h du matin, à Jénine en Cisjordanie. Qu’elle ait été assassinée par l’armée israélienne était évident dès le premier jour, les circonstances comme les preuves matérielles ne laissant aucun doute à cet égard. Comme il arrive souvent aux coupables, les responsables israéliens ont changé de version au fur à mesure que tombaient les conclusions des enquêtes menées par les autorités palestiniennes, comme par des médias occidentaux. Sous la pression des évidences qui s’accumulaient, ils avaient fini par admettre que la balle qui avait fracassé le crâne de la victime avait sans doute été tirée par un soldat israélien. Mais c’était pour ajouter qu’en tout état de cause, ce fut par erreur, et sans intention de donner la mort. Ce qui est déjà un aveu de culpabilité. Ils viennent d’en faire un second, et de plus significatif.

C’est, suite à la décision américaine de confier au FBI une enquête sur le fait en question, leur refus catégorique de laisser l’organisme américain interroger des soldats israéliens. Il est clair que telle n’aurait pas été leur attitude s’il ne s’était agi que d’une tragique erreur. Au contraire, c’est plutôt eux qui auraient été demandeurs d’une enquête indépendante à la fois d’eux-mêmes et des Palestiniens. Qu’en plus ce soit le FBI qui s’en charge, la police d’un pays ami, s’il en est, aurait eu pour effet de faire tomber leurs dernières préventions s’il en persistait quelques-unes. Ce n’est pas le FBI qui bâclerait une enquête juste pour qu’Israël porte le chapeau d’un crime qu’il n’a pas commis. Au contraire, le FBI aurait plutôt envie de prouver son innocence. Mais comme dans ce crime, tout l’accuse, le FBI lui-même ne pourrait pas l’en blanchir. Si la victime n’avait pas été américaine, la Justice américaine ne se serait pas mêlée de cette affaire. En effet, il n’y aurait pas eu de pression exercée sur elle par plus d’une vingtaine de sénateurs démocrates, emmenés par Patrick Leahy, sénateur du Vermont, afin qu’elle ouvre une enquête. Ce à quoi elle a fini par se résoudre, ce qui est tout à son honneur, envers et contre l’exécutif américain, qui lui était prêt a accepter les résultats de l’enquête israélienne. On peut donc déjà affirmer que si Abou Akleh n’est pas morte parce qu’elle était américaine, c’est bien parce qu’elle l’était que la Justice américaine a ordonné une enquête sur les causes de sa mort. De là à penser que c’est parce qu’elle était américaine qu’elle est morte, il n’y a qu’un pas que tout bon Américain hésiterait à franchir. Mais qu’il pourrait franchir s’il y avait suffisamment de preuves à l’appui de cette thèse, ou plutôt de ce soupçon. En réalité, chez une partie de l’opinion américaine a germé le soupçon que les Israéliens ont tué la journaliste parce qu’en plus d’être palestinienne, elle était américaine. Nombre de ces Américains seraient soulagés si les investigations du FBI corroboraient la position israélienne. Le refus d’Israël de laisser le FBI la mener est la meilleure preuve que non seulement il est en l’occurrence coupable, ce qui même pour les Américains ne fait aucun doute, mais qu’il l’est du crime d’avoir tué non pas une Palestinienne mais une Américaine. Son refus est un aveu.

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