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samedi 20 avril 2024

Le Président et le Premier ministre arrêtés par l’armée / Mali : coup de force en pays frontalier

La situation est tendue au Mali. Des militaires maliens mécontents du nouveau gouvernement annoncé par les autorités, ont arrêté le Président Bah Ndaw et le Premier ministre, Moctar Ouane, dans un coup de force, plongeant ainsi le pays dans une nouvelle crise politique.

Par Louisa Ait Ramdane

Situation confuse au Mali. Dans la foulée de l’annonce du nouveau gouvernement et après 9 mois de transition, le Mali replonge dans une nouvelle crise politique qui pourrait le faire retourner à la case départ. Le Président et le Premier ministre de la transition, Bah Ndaw et Moctar Ouane, ont été conduits sous la contrainte par des soldats au camp militaire de Kati, près de Bamako, dans un apparent coup de force après la formation du nouveau gouvernement. «Le Président et le Premier ministre sont ici à Kati pour des affaires les concernant», a dit un haut responsable militaire, selon l’agence AFP qui citait des «sources concordantes», ajoutant qu’un responsable du gouvernement, s’exprimant aussi sous couvert de l’anonymat, a «confirmé» que les chefs de l’exécutif de transition, le Président Bah Ndaw et le Premier ministre, Moctar Ouane, avaient été conduits à Kati.
Le Premier ministre avait indiqué plus tôt avoir été emmené par les militaires. «Je confirme : des hommes de Goïta sont venus me chercher pour me conduire chez le Président qui habite non loin de ma résidence», a dit Moctar Ouane dans un bref échange téléphonique avec des médias, faisant référence à l’homme fort malien, le colonel Assimi Goïta, actuel vice-président de la transition. La conversation s’est ensuite interrompue. Hasard du calendrier, une délégation de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest doit se rendre aujourd’hui à Bamako. «Le coup de force» a été mené quelques heures après une réunion du Conseil de paix et de sécurité (CPS) de l’Union africaine (UA) consacrée à la situation au Mali, lors de laquelle le chef de la diplomatie algérienne, Sabri Boukadoum, a appelé les acteurs maliens à faire preuve de «persévérance» afin d’avancer dans le processus de transition et d’obtenir des résultats concrets dans la mise en œuvre de la feuille de route de décembre portant, entre autres, sur la mise en œuvre de l’Accord de paix, issu du processus d’Alger.

L’Algérie rejette toute action visant à changer le gouvernement par la force
La communauté internationale condamne fermement «le coup de force» et «exige la libération immédiate et inconditionnelle» du Président Bah Ndaw et du Premier ministre, Moctar Ouane, conduits sous la contrainte par des soldats au camp militaire de Kati, à quelques kilomètres de Bamako.
L’Algérie, cheffe de file de la médiation internationale au Mali, a exprimé, hier, son «ferme rejet» de toute action visant à changer le gouvernement au Mali par la force, appelant les acteurs maliens à privilégier le dialogue pour un déroulement paisible de la transition, indique le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué.
«L’Algérie suit avec une très grande préoccupation les derniers développements intervenus en République du Mali et souligne son ferme rejet de toute action de nature à consacrer un changement de gouvernement par la force, en violation du principe cardinal de l’Union africaine en la matière», souligne le ministère. Elle «appelle tous les acteurs concernés à faire preuve d’un sens de responsabilité et à privilégier le dialogue afin de préserver le déroulement paisible et pacifique de la transition et de maintenir la paix et la stabilité dans le pays», relève-t-il. «L’Algérie réaffirme son soutien aux autorités maliennes de transition, sous le leadership du chef de l’Etat M. Bah N’Daw, auxquelles elle n’a cessé d’apporter un appui multiforme en vue d’aboutir au retour définitif de l’ordre constitutionnel, sur la base des engagements souscrits aux termes de la Charte de transition adoptée le 12 septembre 2020, et entérinée par l’ONU, l’UA et la Cédéao», ajoute le communiqué.
De son côté, le Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a appelé dans un tweet «au calme» au Mali et à la «libération inconditionnelle» de ses dirigeants civils, arrêtés dans la journée par des militaires. Selon des diplomates à New York, le Conseil de sécurité de l’ONU pourrait tenir une réunion d’urgence dans les prochains jours sur la situation au Mali. Le Conseil européen a, dans un communiqué, condamné «avec fermeté l’enlèvement du président de transition du Mali et du Premier ministre et appelé à leur libération immédiate». Le Conseil a prévenu que «l’Union européenne était prête à envisager des mesures ciblées à l’encontre des dirigeants politiques et militaires faisant obstruction à la transition au Mali».

La Minusma appelle à la libération du Président et du Premier ministre
Réagissant à ce coup de force, la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) a appelé à la «libération immédiate et inconditionnelle du Président et du Premier ministre» maliens, conduits «sous contrainte» par les forces militaires à la base de Kati (à 15 km de Bamako).
La Minusma a lancé son appel via Twitter, lundi dans la soirée. «Nous suivons avec attention les événements et restons engagés en appui à la Transition. Nous appelons au calme et exigeons la libération immédiate et inconditionnelle du Président et du Premier ministre. Ceux qui les détiennent devront répondre de leurs actes», a écrit la mission onusienne.

Le président de l’UA condamne et appelle à la retenue
Le président congolais, président en exercice de l’Union africaine (UA), Félix Tshisekedi, a «fermement» condamné «toute action visant à déstabiliser le Mali», appelant «tous les acteurs de la transition politique malienne à la retenue ainsi qu’au respect de la Constitution». Tshisekedi qui s’exprimait sur le compte Twitter de la Présidence congolaise a également appelé à la «libération immédiate et inconditionnelle» des personnalités arrêtées. «Tout doit être mis en œuvre afin de préserver la stabilité du Mali et consolider la paix dans la sous-région», a encore plaidé le président de l’Union africaine.
Le Comité de suivi de la transition condamne un «coup de force»
Le Comité local de suivi de la transition au Mali, composé notamment de la Cédéao, de l’Union Africaine, de la Minusma, et de l’Union européenne, a exprimé sa profonde préoccupation face à la situation au Mali, marquée par «la conduite sous la contrainte» du Président de la transition et du Premier ministre par des soldats au camp militaire de Kati, près de Bamako.
Les membres de ce Comité ont fermement condamné «la tentative de coup de force» survenue à la suite de la publication du décret portant nomination des membres du gouvernement par le président de la transition sur proposition du Premier ministre. Le communiqué a également exigé «la libération immédiate et inconditionnelle» de ces autorités, rappelant que les militaires qui les détiennent seront tenus «personnellement responsables de leur sécurité». Le Comité de suivi a réaffirmé son «soutien ferme» aux autorités de la transition en exigeant que le processus reprenne son cours pour se conclure dans les délais prévus.
L. A. R.

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