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mercredi 29 novembre 2023

L’annonce faite par el-Serraj

Fayaz el-Serraj se dit prêt à quitter son poste de chef du Gouvernement d’Union nationale, et cela dès la fin octobre, si le dialogue en cours entre les parties libyennes débouche sur la désignation d’un nouveau Conseil présidentiel. Il faut saluer cette intention, parce que ce n’est pas tous les jours qu’on voit dans notre région un dirigeant montrer une disposition de cette nature. Cela dit, il faut faire attention à ne pas lui accorder plus d’importance qu’elle n’en a en réalité. En particulier, par son entremise, el-Serraj n’a pas fait savoir qu’il quittait la scène au plus tard à la fin d’octobre, ce qui autant dire est demain, mais seulement qu’il accepterait cette idée si les conditions essentielles de son retrait étaient réunies. Pour juger de la faisabilité ou non de son départ, ce n’est pas donc ce qu’il en dit lui-même qui importe le plus, mais ce à quoi il le subordonne et qui ne dépend pas de lui. S’il avait fait savoir que sa décision était prise, qu’il démissionnerait à la fin du mois prochain, dans tous les cas de figure, que le dialogue interlibyen ait ou non suffisamment avancé pour permettre la mise en place d’un nouveau Conseil présidentiel, dans ces conditions oui, il serait à prendre au sérieux. Son départ serait certain ou quasiment. Mais telles n’ont pas été ses paroles, ni par conséquent son propos. Vu la condition qu’il a posée, à l’évidence irréalisable dans le court terme, il ne serait pas même faux d’affirmer qu’en fait ce qu’il a annoncé, ce n’est pas qu’il s’en allait mais qu’au contraire il restait.

Il y a fort à parier en effet que d’ici la fin octobre les négociations libyennes n’auraient pas progressé de beaucoup par rapport à leur état actuel. On ne peut même pas exclure qu’elles se soient arrêtées. A en juger par l’aspect qu’elles offrent pour l’heure, c’est d’ailleurs à cela qu’il faut s’attendre le plus. Mais il y a plus et plus sérieux pour douter de l’intention d’el-Serraj. Il y a en effet que l’objectif des négociations n’est pas le remplacement d’un Conseil présidentiel par un autre, mais de faire retrouver à la Libye son unité politique et territoriale. On ne peut dire du dialogue qu’il a abouti que dans la mesure où il n’a rien laissé des accords de Sekhirat. Dès lors on s’explique la déclaration d’el-Serraj. Le fait est qu’on s’est mépris sur le dialogue en question. On a cru qu’il s’agissait de celui qui se tenait sous l’égide des Nations, soit à Bouznika, soit au Caire, soit ailleurs. Alors que celui dont lui-même avait en vue selon toute apparence ne concernait que les factions se trouvant à Tripoli. Ce n’est en effet qu’à Tripoli, au sein du gouvernement de Tripoli, qu’il peut être question de remplacer un Conseil présidentiel par un autre. Ou plus précisément un président de ce conseil par un autre. Par exemple, un Fayaz el-Serraj par un Fathi Bachagha, d’autant qu’une mésentente a surgi entre eux et qu’elle s’est résolue en faveur de ce dernier. Il est ministre de l’Intérieur dans le même gouvernement, et néanmoins l’homme sinon le chef de la principale force armée en Tripolitaine, la milice de Misrata. Limité à ce domaine de définition, le propos d’el-Serraj s’en trouve décodé, restauré en langage clair, compréhensible y compris par les non-initiés. C’est son auteur qui s’adresse au président turc pour lui dire qu’il est prêt à démissionner si tel est son désir. Ce à quoi Erdogan répond, mais en langage chiffré, qu’il regrette sa décision mais qu’il la respecte.

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