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vendredi 19 avril 2024

L’Abrams se fera attendre

Maintenant que la décision est prise par certains membres de l’Otan d’envoyer à l’Ukraine des chars de combat, d’ailleurs tous allemands à l’exception de 14 qui sont britanniques, il s’agit de les livrer à domicile dans leur meilleur état et dans un délai qui soit raisonnable. Cette deuxième condition est tout aussi importante que la première, car s’ils arrivent alors que l’offensive russe a déjà eu lieu tout en étant couronnée de succès, ils ne serviront pas à faire reprendre à l’armée ukrainienne l’initiative, qui ces derniers temps appartient à l’armée russe. L’idéal pour les bénéficiaires, ce serait bien sûr qu’ils arrivent dès maintenant, et qu’ils soient opérationnels sur-le-champ. Or même s’ils parvenaient tous à se jouer du système de surveillance russe, il faudrait encore du temps avant que les combattants ukrainiens apprennent à s’en rendre maîtres. Même alors cependant, les Abrams américains ne seront pas de la partie, leurs fabricants ayant pris un certain soin d’avertir leurs alliés, ukrainiens et non ukrainiens, qu’il fallait compter plusieurs mois avant de pouvoir bénéficier pleinement de leur supériorité opérative. D’ici à ce qu’ils soient disponibles, et que par là même ils donnent l’avantage à l’Ukraine, qui pourra alors seulement songer à se lancer dans la contre-offensive à outrance, il se peut que le sort des armes soit réglé, en faveur de la Russie dans ce cas de figure.

A se demander même si les Américains n’ont pas calculé leur coup de façon à ce qu’en fin de compte ils n’aient même pas à les livrer, sinon pour les offrir aux Russes, ou pour leur donner le plaisir de les brûler, comme ils ont déjà dit qu’ils feraient. Mais il est vrai que ce sort, ce n’est pas seulement aux Abrams que les Russes comptent le réserver, mais tout étant aux Leopard et aux Challenger, les Leclerc français ne faisant selon toute vraisemblance partie d’aucun envoi, leurs propriétaires ayant fait savoir en effet qu’ils avaient besoin de tous pour leur propre défense. Si bien qu’on ne saura probablement pas ce qu’ils valent par rapport aux autres, si en particulier ce que disent leurs propriétaires de leur excellence est mérité ou surfait. Cela dit, la France n’en produisant plus depuis plusieurs années déjà, on peut penser que montrer de quoi ils sont capables dans une guerre aussi intense que celle qui pour le moment se déroule en Ukraine n’est pas pour elle d’un grand intérêt. Si elle en fabriquait encore, et qu’elle tenait à leur trouver des clients, sans doute ç’aurait été pour elle là une occasion à ne pas rater. Le prochain char que la France se propose de fabriquer ne verra pas le jour avant 2040, et il ne sera français qu’à moitié, l’autre moitié étant allemande, si tant est que le projet ne soit pas abandonné dans l’intervalle. Ainsi donc, le Leopard allemand n’aura à se mesurer, dans l’hypothèse où il arrive à temps et en nombre suffisant, qu’au T-90 russe dit le Terminator, personne ne considérant le Challenger britannique comme une arme de valeur équivalente. Ceux qui espéraient assister à un combat singulier opposant l’Abrams au Terminator seront vraisemblablement déçus, le premier ne devant entrer dans l’arène que plus tard, si jamais il le fait, et de préférence lorsqu’aucun autre tank n’est encore sur ses chenilles pour le défier. Il en est de lui comme de l’art américain de la guerre dans son ensemble : rejoindre le champ de bataille non pour faire la décision mais pour se saisir de la victoire, lorsqu’arrive ce moment précis où les belligérants s’étant épuisés réciproquement n’ont même plus la force de tendre la main pour la prendre et la revendiquer.

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