D’hier à aujourd’hui, le cessez-le-feu entre d’une part les factions palestiniennes agissant depuis Ghaza, et de l’autre Israël, aura tenu 24 heures de plus, ce qui est pour conforter l’idée qu’une page est bel et bien tournée dans le conflit interminable israélo-palestinien, même s’il faut attendre plus longtemps pour s’en assurer tout à fait. En règle générale en effet, tant que plusieurs jours ne se seront pas écoulés à partir de l’entrée en vigueur d’un cessez-le-feu convenu entre les parties prenantes à un conflit, l’éventualité la plus probable est qu’il soit violé, non qu’il soit strictement observé depuis lors. Tout le monde se doute néanmoins que dans ce cas précis, toute violation d’où qu’elle vienne et de quelque portée qu’elle soit est de nature à relancer les combats, et même à leur faire retrouver leur première intensité. Entre le Hamas, pour ne parler que de la plus importante des factions palestiniennes implantées à Ghaza, et Israël, il n’y a pas de demi-mesure en matière de guerre et de paix : ou bien les hostilités s’arrêtent dans le délai convenu, ou bien elles se poursuivent sans relâche et sans merci. Il y a le respect de la parole donnée, ou du moins le souci de ne pas démonétiser la sienne, même si les officiels israéliens disent conserver le droit d’abattre les figures de proue du Hamas dès que l’occasion s’en présente.
Des images de dirigeants du Hamas ont été diffusées où on les voit circuler dans les quartiers dévastés de Ghaza et présenter longuement leurs condoléances à des familles endeuillées. A les regarder, sûrement bien des gens n’ont pu s’empêcher d’imaginer un obus israélien tiré du ciel venant s’abattre sur eux. Il est toutefois l’un d’eux qui probablement ne prendra jamais un tel risque, sachant que pour avoir sa peau, Israël ne reculera devant rien. C’est Mohammed Dief, le chef des Brigades Izz al-Din al-Quassam, la branche armée du Hamas, l’objectif principal que s’était fixé cette fois-ci Israël et qu’il n’a pas atteint, qu’il croit avoir raté à deux reprises au cours de ces onze jours de guerre implacable. Ce double ratage à lui seul dit qu’il a perdu cette guerre. Et que donc le Hamas, l’ensemble des Palestiniens et leurs partisans à travers le monde ont quelque raison de crier victoire. Cet homme encore vivant, c’est pour eux la victoire. Lui mort, c’est celle des Israéliens. La réalité est en fait plus complexe. Et d’abord, si victoire il y a, elle n’a rien d’éclatant, ni même seulement d’évident. Le Hamas au demeurant ne parle pas de victoire, de victoire tout court, mais de victoire stratégique sur Israël, ce qui semble dire qu’elle n’est pas évidente, comme telle visible pour tous. Il lui aurait porté à cette occasion à l’ennemi un coup dont celui-ci ne ressentirait les effets que plus tard, lors des guerres prochaines. En quoi cette victoire s’est-elle matérialisée ? Quelle forme précise a-t-elle prise ? Pas facile de le savoir, d’autant que le Hamas n’a pas été plus explicite. Il ne peut avoir à l’esprit le fait que pour la première fois ses roquettes sont tombées dans la profondeur d’Israël, loin de Ghaza, car dans ce cas les mots appropriés auraient été ceux de « victoire tactique » non pas ceux de « victoire stratégique ». Il faut croire qu’il a en vue autre chose. Risquons l’hypothèse qu’il pense ce disant au changement dans l’opinion des Etats-Unis, le principal soutien d’Israël, lequel s’est traduit par une telle pression sur le président des Etats-Unis que celui-ci n’a pu lui résister. Ce qui l’a poussé à parler à nouveau au Premier ministre israélien et sur un ton qui montrait que sa patience était à bout. Ce changement, lui en revanche, est tout à fait nouveau. Et sa portée est stratégique.