Il n’est pas dans les mœurs de la guerre qu’une armée en campagne communique, pour ainsi dire en temps réel, sur les pertes qu’elle subit, quelles qu’elles soient, importantes ou minimes. Elle laisse bien sûr ce soin à l’ennemi, qui lui-même du reste ne s’en charge que lorsque le coup qu’il a porté est suffisamment fumant pour mériter d’être claironné sur le champ, cela étant en particulier bon pour le moral de ses troupes. Ce qu’en revanche tous les pays en guerre sans exception sont portés à faire savoir au moment même où cela se produit, ce sont les pertes de civils enregistrées de leur côté, brandies comme autant de preuves de la pulsion criminelle qui anime l’ennemi. S’il arrive néanmoins qu’une armée informe sur une grosse perte qu’elle vient de subir, c’est que non seulement elle ne l’a pas digérée mais qu’elle compte en tirer vengeance dans pas longtemps. C’est alors qu’il faut faire attention aux termes qu’elle emploie pour ce faire, car chacun est important. Les Russes n’ont pas caché que plus d’une soixantaine de leurs soldats récemment mobilisés ont été tués suite à une attaque ukrainienne de missiles, au nombre de 6 exactement, qui sont tombés sur une sorte de campement de transit à Makiïvka, une ville de Donetsk. L’information précise bien aussi que c’est par un lance-roquettes américain Himars que ces projectiles ont été tirés.
A noter que ce sont les Russes qui les premiers l’ont donnée. Ensuite seulement les Ukrainiens ont confirmé l’attaque, mais comme il est de règle en l’assortissant d’un bilan bien plus lourd. On a appris par la suite que c’est parce que les nouveaux soldats russes se sont servis de leurs portables que leur emplacement a été localisé. Là aussi il faut voir la main des Américains, qui n’ont jamais caché qu’ils ne faisaient pas qu’envoyer des armes à Kiev mais qu’ils lui indiquaient aussi les bonnes cibles à frapper. Ce détail, il est vrai, n’est pas présent dans le communiqué russe. S’il l’avait été, ce serait comme si ses auteurs avaient tenu à préciser que les vrais auteurs de l’attaque, ce n’étaient pas les Ukrainiens mais les Américains. En réalité, c’est bien ce qu’ils disent entre les lignes, d’une part en donnant l’information, et de l’autre en précisant le type d’arme utilisé en l’occurrence contre eux. Une chose semble certaine : si des militaires américains étaient présents en Ukraine, et qu’ils étaient repérés, qu’eux-mêmes ou non soient directement responsables de l’attaque en question, ils seraient déjà directement attaqués à l’heure qu’il est et peut-être morts. La nouvelle année ne fait que commencer que l’on voit déjà qu’elle aurait du mal à se terminer tout en conservant au conflit en cours sa forme actuelle de guerre impliquant directement deux belligérants, à savoir bien sûr les Russes et les Ukrainiens, mais avec d’autres parties prenantes agissant sans désemparer dans l’ombre de ces derniers. La saignée de Makiïvka dont les Russes ont fait les frais le deuxième jour de la nouvelle année est une expérience qui à leurs yeux ne devrait pas se renouveler, et qui justement pour cela doit être vengée, de préférence sur les Américains ou sur quelque autre membre de l’Otan. Cela veut dire qu’elle a déjà changé le cours de la guerre, à cela près que cela n’est pas encore visible. En tout cas, c’est là le seul sens susceptible d’être extrait de l’inhabituel communiqué de l’armée russe.