Après trois réunions infructueuses, l’organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) et ses alliés de l’Opep+ n’ont pas réussi à se mettre d’accord sur de nouveaux quotas de production, causant ainsi l’envolée des prix du pétrole.
Par Meriem Benchaouia
C’est l’impasse, l’Opep et ses dix alliés de l’Opep+, menés par la Russie, ont annulé in extremis leur dernière réunion, prévue lundi, faute d’accord sur de nouveaux quotas de production de pétrole à partir du mois d’août au sein du cartel d’exportateurs. La réunion a pour l’instant été reportée sine die, sans plus d’explication. Un échec des négociations n’est pour l’instant pas certain. Mais il ne serait pas une bonne surprise pour les consommateurs. Le sommet ministériel de l’Opep+ « a été annulé « , a écrit dans un communiqué le secrétaire général de l’Opep, Mohammed Barkindo, envoyé à la presse. » La date de la prochaine réunion sera décidée en temps utile « , est-il indiqué dans le même document. Un plan était pourtant sur la table de l’alliance : celui d’augmenter chaque mois la production de pétrole de 400 000 barils par jour entre août et décembre, soit un total de 2 millions de barils quotidiens remis sur le marché d’ici la fin de l’année, dans un contexte de reprise de la demande. Mais un différend a émergé entre les Émirats et ses partenaires sur un point technique : son volume de production de référence. Ce seuil arrêté à la date d’octobre 2018 correspond pour Abou Dhabi à 3,17 millions de barils par jour. Il ne reflète effectivement pas la pleine capacité de production du pays, qui est montée à plus de 3,8 millions de barils par jour en avril 2020, à la veille des coupes drastiques du cartel. « C’est tout le groupe contre un seul pays », avait commenté, dimanche, le ministre saoudien Abdelaziz ben Salmane interrogé par Bloomberg TV, tout en appelant dans une autre interview, sur la chaîne Al-Arabiya, à « un peu de rationalité et un peu de compromis ». Cette divergence avait déjà fait capoter le premier cycle de réunions du cartel jeudi dernier, puis de nouveau le lendemain, au sein d’un groupe davantage habitué aux prises de bec entre les deux poids lourds, la Russie et l’Arabie saoudite. « Le timing de cette crise n’est pas surprenant », a réagi auprès de l’AFP Alan Gelder, analyste de Wood Mackenzie, « car l’Opep fonctionne mieux lorsqu’elle est confrontée à des défis importants » et des prix bas. Sa stratégie depuis avril 2020, faite d’une réduction drastique de la production puis d’un retour progressif de celle-ci par palier mensuel, en est l’illustration puisqu’elle a permis aux vendeurs de faire sortir les cours du brut de l’abîme.
La recherche du consensus
« Le report et le temps qu’il a fallu pour l’annoncer montrent que des négociations sont en cours en marge de la réunion », estime Louise Dickson, de Rystad, notant « l’effort pour parvenir à un consensus ». Les discussions sur le prolongement de l’accord au-delà d’avril 2022, qui ont fait bondir Abou Dhabi, « risquent toutefois de s’avérer longues et difficiles », prévient M. Gelder. Pour Samuel Burmann, de Capital economics, ce troisième report depuis jeudi fait carrément planer le spectre de « l’effondrement de l’ensemble de l’accord ». L’Opep+ fait de surcroît face à une équation complexe, entre une reprise bien réelle de la demande mais qui reste fragile, un retour probable à moyen terme des exportations iraniennes et le mécontentement de certains gros importateurs comme l’Inde devant les prix élevés. Mais l’alliance en a déjà vu d’autres. Elle a notamment su dépasser en début d’année dernière un désaccord profond entre Moscou et Riyad qui avait débouché sur une courte mais intense guerre des prix.
Le Brent s’approche des 78 dollars
Les prix du pétrole grimpaient de plus belle hier, portés par le désaccord des membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole et de leurs alliés via l’accord l’Opep+ qui pourrait entraîner une offre limitée dans les prochains mois. Le baril de Brent de la mer du nord, de référence européenne, pour livraison en septembre, a monté à 77,84 dollars, une première depuis fin octobre 2018. Il cotait 77,58 dollars vers 08H45 GMT, en hausse de 0,54% par rapport à la veille. La référence américaine, le WTI pour livraison en août, quant à lui, a dépassé 76,90 dollars pour la première fois depuis novembre 2014, pour monter jusqu’à 76,98 dollars. Il grimpait de 1,92% à 76,60 dollars plutôt dans la matinée. Selon des analystes, l’absence d’accord sur l’augmentation de la production en août et au-delà laisse le marché encore « plus déficitaire qu’auparavant ».
M. B.