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vendredi 29 mars 2024

La question qui du moins ne se pose plus

On se demandait ici l’autre jour, à la façon dont les Américains en avaient usé avec leurs alliés européens en Afghanistan, après qu’ils eurent sonné unilatéralement le retrait de ce pays, si vraiment les Européens avaient gagné au change avec le remplacement à la tête des Etats-Unis de Donald Trump par Joe Biden. Après la vidéoconférence diffusée en direct jeudi dernier, réunissant Joe Biden, Boris Johnson et Scott Morrison, au cours de laquelle le «contrat du siècle» de livraison à l’Australie de 12 sous-marins à propulsion diesel est annulé par l’acheteur, un allié, et que c’est un autre allié, les Etats-Unis, qui s’adjuge le marché, la question ne se pose même plus. Ni pour les Français, les victimes en l’occurrence de ce qu’il faut bien appeler une brutalité singulière entre alliés, imparable de ce fait même, ni pour les autres Européens, notamment ceux qui avaient trouvé à redire à la retraite d’Afghanistan, parmi lesquels le Royaume-Uni d’ailleurs. En comparaison de cet affront fait à la France, traitée de même que si elle était un ennemi, tout ce que s’était permis Trump à leur endroit, et qui leur avait fait pousser des cris d’orfraie, semble maintenant des peccadilles, presque des enfantillages. Loin d’avoir gagné au change, ils y ont perdu au contraire.

Ce serait plutôt à regretter Trump, qui après tout ne donnait pas ce genre de  » coup dans le dos « , pour parler comme Jean-Yves Le Drian, artisan du contrat annulé unilatéralement. Certes, Trump n’aurait eu aucun scrupule à faire comme Biden, mais il y aurait mis un peu de forme, comme par exemple informer les Français avant la vidéoconférence, ou même par un appel à leur président, avec lequel après tout il semblait entretenir de bonnes relations. Cela dit, il ne doit exister nulle façon qui soit douce de faire pareille annonce. De là peut-être le choix fait par Biden d’y aller le plus durement, le moins amicalement possible, de façon à en finir sur-le-champ. On relèvera par ailleurs que dès qu’il s’est agi de prendre une mesure visant à contenir le Chine, le principe de non-prolifération nucléaire est oublié par les Américains, et les Britanniques par là même occasion. Les 12 sous-marins à livrer par eux à l’Australie sont à propulsion nucléaire, en effet, à la différence de ceux qui étaient convenus avec la France. Des sanctions draconiennes sont mises en œuvre pour contrer le programme nucléaire iranien, pourtant conçu à des fins civiles, au motif principal qu’il faut empêcher la prolifération nucléaire. Or voilà que les Américains et les Britanniques n’hésitent pas à doter de sous-marins à propulsion nucléaire leur meilleur allié dans la région indopacifique, le théâtre probable d’un conflit avec la Chine. Sans doute y a-t-il une différence, s’agissant d’une arme, entre être à propulsion nucléaire et être nucléaire tout court. N’empêche, c’est là enfreindre ce même principe en vertu duquel on s’en prend impitoyablement à l’Iran. Aux yeux de Joe Biden, le leadership américain doit être aussi moral. Les Etats-Unis, il l’a dit et répété depuis qu’il est président, dirigent le monde non pas seulement parce qu’ils sont les plus forts, mais parce qu’ils forment la nation la plus morale. A l’entendre, ce serait même parce qu’ils sont les plus moraux qu’ils sont les plus forts. Voilà une prétention que Trump n’aurait pas eue.  » America first  » lui suffisait comme principe d’action.

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