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vendredi 2 juin 2023

La politique sans lendemain du pas à pas avec la Syrie

A en croire le discours de la Ligue arabe sur le retour de la Syrie en son sein, en tant que membre à part entière, et même davantage, étant donné qu’elle est membre fondateur, ce retour est conditionnel. A Djeddah le président syrien se serait pour ainsi dire assis sur un siège éjectable. Son véritable statut serait celui d’un invité, comparable à celui par exemple du président ukrainien Volodymyr Zelensky, sauf que lui n’était pas tenu de se retirer après la séance d’ouverture. Jusqu’à présent, c’est l’organisation qui a fait le premier pas, en permettant justement à Damas de réoccuper son siège, resté vide depuis 2011. A charge maintenant pour lui de jouer le jeu en faisant le pas attendu de lui, consistant en la reprise du dialogue avec son opposition, conformément au plan élaboré par l’ONU et approuvé par le Conseil de sécurité portant résolution de la crise syrienne. Après quoi, la Ligue arabe fera un deuxième pas, suivi d’un autre de la part de la Syrie, et ainsi de suite jusqu’à ce que les deux parties se rejoignent en un centre imaginaire, ce qui du même coup amènerait le processus ainsi défini à son terme.

Ce discours s’accompagne logiquement d’un contre-discours, qui lui implique un retour en arrière, vers la situation prévalant avant le sommet de Djeddah, dans le cas où la Syrie se refuse à faire ce qu’il est supposé faire. Il est bien évident que ce n’est pas du tout ainsi que l’entend Damas. Pour lui son retour n’a été payé d’aucune concession de sa part. C’est la Ligue qui a pris l’initiative de le rappeler en son sein, sans rien lui demander en échange. Il aurait d’ailleurs refusé un marché de ce genre. Pour autant, le risque d’une nouvelle suspension n’est pas sérieux, il est nul, même si des pays membres se sont opposés au retour. La Ligue n’a aucunement l’intention de suivre cette ligne dite du «pas à pas», suivant laquelle la Syrie aurait encore du chemin à faire avant que ses représentants puissent se carrer en toute assurance dans leur siège. Damas ne ferait pas à cet effet ce que les pressions des Occidentaux, relayées par l’ONU, avaient échoué à lui faire faire. Ses forces armées ont repris pendant ces douze années de suspension le contrôle sur les trois quarts de son territoire. Ne restent plus qu’Idleb au nord-ouest, et le nord-est passé l’Euphrate, hors de son contrôle, mais sous celui des Turcs et des Américains. Les Etats arabes, les bienveillants comme les malveillants, ne pourraient rien faire pour l’aider à rétablir son autorité sur l’ensemble de son territoire. Ils pourraient lui demander quelque chose en retour s’il dépendait d’eux que les forces étrangères indésirables quittent le pays. Ce n’est pas le cas. Moralité : il n’est tenu à rien pour conserver son siège. Il existe des pays en droit de formuler des exigences dont il aurait été obligé de tenir compte. Ces pays sont la Russie et l’Iran, sans le soutien desquels il aurait cessé d’exister. Il se trouve qu’eux ne lui demandent pas d’ouvrir le dialogue avec les groupes ayant pris les armes contre lui, et qu’en plus il a vaincus. Il existe néanmoins un autre pays dont les avis comptent : la Turquie, qui abrite des millions de Syriens, dont l’armée est présente, et qui elle va rester à ses frontières pour longtemps encore. Il y a bien les Etats-Unis militairement présents eux aussi, qui ne se retirent pas entre autres pour peser sur la solution finale, mais que Damas n’a d’autre choix que d’ignorer, aucun accord
n’étant possible avec eux pour le moment.

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