Le délai de quinze jours fixé par Emmanuel Macron à la classe politique libanaise lors de son deuxième voyage à Beyrouth, intervenu le 1er septembre, avant lequel elle doit s’être mise d’accord sur un nouveau gouvernement placé sous la houlette de Mustapha Adib a expiré sans que cette tâche ait été accomplie. Sans même qu’il soit acquis qu’elle le sera bientôt. Dans ce pays on sait qu’entre le moment où un chef du gouvernement reçoit la charge de former un gouvernement et celui où cela est chose faite, la règle est qu’il se passe non pas des semaines mais des mois, tant cet exercice est ardu. Un exécutif libanais est un délicat ouvrage d’orfèvrerie qui a besoin de beaucoup de temps, de patience et de minutie pour être ciselé puis monté. Ce qui, soit dit en passant, plaiderait plutôt pour la solidité de l’Etat libanais, vu qu’il est capable de tenir par lui-même pendant des mois, sans un pouvoir exécutif pour l’animer. A elle seule cette gageure ne serait pas tenable, à moins que quelque chose d’exceptionnel ne s’en mêle. Cet élément aussi inattendu que contraignant, c’est l’injonction faite par le président français à la classe politique libanaise de limiter ses tractations au strict minimum, sous peine de se voir encore plus durement traitée par lui. Or le délai est passé et sans qu’un gouvernement ne soit annoncé. Cela n’a pas amené la France à prendre des mesures de rétorsion, mais à accorder une prolongation, certaine sans doute que celle-ci serait de courte durée.
Au Liban, c’est la France qui est à la barre, le pays faisant partie de son ancien domaine, mais en réalité c’est avec l’accord à la fois des Etats-Unis et du FMI qu’elle agit. Entre autres difficultés assaillant aujourd’hui le Liban, il y a sa crise financière, qui le met dans l’impossibilité d’honorer ses engagements. Un pays en cessation de paiement, comme on dit, n’a plus de souveraineté économique. Pour être renfloué, il se soumet à des conditions. S’agissant du Liban, la conditionnalité comporte certes un volet relevant de la compétence des institutions financières internationales, en premier lieu du FMI, mais ce n’est pas ce qui dans son cas est essentiel. C’est d’ailleurs ce qui explique que ce ne soit pas le FMI qui tient la férule mais la France, pour qui à l’évidence l’urgence aujourd’hui au Liban n’est pas économique mais politique. Sa première exigence est que le gouvernement Adib soit un gouvernement de compétences. Sa deuxième est qu’il soit formé dans un temps record. Les deux sont d’ailleurs parfaitement cohérentes. D’où la quinzaine prescrite. Sa prolongation ne signifie pas qu’elle soit abandonnée, mais juste quelque peu étirée. Adib se voit bénéficier d’une rallonge, en aucune façon d’une dispense. La bride est toujours sur son cou, qui peut à tout moment être tirée vers l’arrière. Tout au plus dispose-t-il de quelques jours pour amener tous les Libanais à résipiscence. A lui accorder leur confiance. En clair, cela veut dire qu’il doit encore convaincre les partis à cautionner un gouvernement dont ils ne feront pas partie. Ce serait alors le premier désarmement du Hezbollah. Son désarmement psychologique en quelque sorte, en prévision du deuxième : son désarmement pur et simple. Sinon, pas d’aide susceptible d’aider le Liban à se remettre sur ses pieds pour marcher tout seul.