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jeudi 23 mars 2023

Kaïs Saïed possible homme de l’année

Il est une chose qu’il faut accorder à Kaïs Saïed, quoi que puissent penser par ailleurs de lui ses détracteurs tunisiens (cette précision n’est pas de trop, car de non Tunisiens il n’en a pas, de déclarés en tout cas), c’est qu’il ne se laisse presser par personne. D’abord, il a pris tout son temps pour publier sa feuille de route, n’écoutant en cela ni ses amis ni ses adversaires, à qui il arrivait de protester à l’unisson pour le forcer à accélérer la cadence. Il a attendu cinq mois pour ce faire, ne voyant pour sa part aucun feu prendre dans le pays en raison de la lenteur de sa démarche. Ce n’était pas les foules clairsemées qu’Ennahdha et ses alliés, de circonstance et de toujours, parvenaient difficilement à rassembler qui pouvaient le convaincre de faire plus vite. D’autant que celles de ses partisans étaient toujours plus nombreuses, sans être pour cela imposantes. Des foules de la même taille et de la même radicalité que celles qui avaient fait partir Ben Ali en 2011, il n’y en a eu ni d’un côté ni de l’autre depuis le 25 juillet. Lui-même, du reste, n’avait pas besoin de recourir à une démonstration de force. Il lui suffisait que ses adversaires soient incapables d’en donner une. Ce n’est pas au «putschiste» qu’il est censé être pour eux d’apporter la preuve que le peuple est mécontent de lui.

Si les masses populaires ne se soulèvent pas contre lui, si elles ne manifestent même pas contre lui, après qu’il a suspendu le Parlement, c’est qu’elles sont d’accord avec lui. Mieux encore, c’est qu’il a agi conformément à leur vœu le plus secret. Elles voulaient qu’il mette fin à une mascarade parlementaire qui les excédait, mais contre laquelle elles ne pouvaient rien. Aujourd’hui, comme hier, il n’y a que la classe politique, à peu près toutes tendances confondues, et Moncef Marzouki, qui à lui seul fait plus de bruit que tout le monde, ce qui d’ailleurs lui a valu une première condamnation de quatre ans, pour parler de coup d’Etat en Tunisie. Ni la France, ni les Etats-Unis, ni aucun des Etats prompts à dénoncer les coups d’Etat, n’en dénonce un du fait de Kaïs Saïed. Moncef Marzouki est plus que jamais en porte-à-faux : il demande aux Occidentaux de condamner quelque chose qui pour eux n’est pas condamnable, du moins dans son état actuel. A une classe politique qui ne peut pas mobiliser l’opinion pour obliger le pouvoir à faire marche arrière, il ne reste
qu’une seule corde, qu’un seul recours : la grève de la faim, dans l’espoir de s’attirer la sympathie des Tunisiens et des étrangers. Marzouki y est partant, mais de façon symbolique, tiennent à préciser ses adversaires. Comme pour dire qu’on n’espère pas se débarrasser de lui de cette façon. Le président tunisien a pris tout son temps avant de publier la feuille de route. Il prend deux fois plus de temps pour la mettre en œuvre. Une demi-année pour consulter les Tunisiens et faire adopter une nouvelle Constitution. Une autre demi-année pour faire élire un nouveau Parlement. Si son plan est appliqué au bout du compte, il se sera étalé sur une année et demie. D’ici décembre de l’année prochaine, bien des événements peuvent se produire. Y compris la révolte sociale, dans un pays en proie aux difficultés économiques. C’est plus que jamais sur elle que reposent les espoirs des opposants à Kaïs Saïed, n’ayant pu déclencher une révolte politique. Non pas faute d’avoir essayé.

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