Le directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), Rafael Grossi, a rencontré, hier à Téhéran, les responsables iraniens, le jour de l’expiration d’une échéance fixée par l’Iran pour la levée des sanctions américaines.
Par Mourad M.
Arrivé samedi soir dans la capitale iranienne, il a entamé ses discussions sur le dossier nucléaire avec le président de l’Organisation iranienne de l’énergie atomique (OIEA), Ali Akbar Salehi. Il tiendra en soirée une conférence de presse à son retour à Vienne, siège de l’AIEA.
Sa visite survient alors que le Parlement iranien a fixé à hier 21 février la date limite pour restreindre certaines inspections de l’AIEA, «gendarme» nucléaire de l’ONU, sur des installations non nucléaires, y compris des sites militaires suspects en Iran.
Une éventuelle application de cette loi commencerait mardi, selon M. Salehi, même si l’Iran a souligné ces derniers jours qu’il ne cesserait pas de collaborer avec l’AIEA et n’expulserait pas ses inspecteurs. Ces inspections sont prévues par l’accord international de 2015, censé encadrer le programme nucléaire iranien, accord duquel la précédente administration de Donald a retiré unilatéralement les États-Unis en 2018 en rétablissant des sanctions qui étranglent l’économie iranienne. «A mon avis, les inspections de l’AIEA seront réduites d’environ 20 à 30 % après la mise en œuvre de la loi», a déclaré samedi soir le vice-ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, dans une interview télévisée. «Cela ne signifie certainement pas un retrait de l’accord de 2015».
Après la politique de «pression maximale» de Donald Trump, l’Iran s’est affranchi progressivement à partir de 2019 de nombre de limites qu’il avait accepté d’imposer à son programme nucléaire en vertu de l’accord conclu en 2015 avec le groupe 5+1 (États-Unis, France, Allemagne, Grande-Bretagne, Russie, Chine). L’Iran ne cesse de dire qu’il reviendrait à ses engagements si la nouvelle administration américaine de Joe Biden lève les sanctions et celle-ci réclame un retour de l’Iran à ses engagements, les deux camps se renvoyant la balle. Jeudi, les États-Unis ont accepté l’invitation des Européens à participer à des pourparlers pour relancer l’accord de 2015. Mais le lendemain, Joe Biden a appelé les puissances européennes à travailler de concert avec les États-Unis pour répondre aux «activités déstabilisatrices» de l’Iran au Moyen-Orient. Dans ce contexte diplomatique complexe et alors que l’Iran et les États-Unis n’entretiennent pas de relations diplomatiques depuis 1980, M. Araghchi a indiqué que l’Iran examinait la proposition de l’UE pour une «réunion informelle».
«Nous déciderons après des consultations», a-t-il dit, ajoutant que l’Iran en parlerait avec «des amis et des alliés comme la Chine et la Russie».
La visite de M. Grossi a reçu un accueil mitigé dans la presse iranienne. Le quotidien ultraconservateur «Kayhan» a salué la loi du Parlement qui a «emmené» Rafael Grossi en Iran. «Cette «stratégie a montré au camp adverse que la rupture du contrat est coûteuse», a écrit le journal en Une en dénonçant «l’escroquerie occidentale».
En revanche, le journal réformateur «Sharq» a dit douter de l’efficacité du vote de cette loi, vu que Washington «n’a manifesté aucune volonté de revenir à l’accord sous les conditions iraniennes».
«Il n’y a aucune perspective d’ouverture jusqu’à présent», a souligné le quotidien, estimant que «les jours à venir sont critiques pour l’Iran» et pour les autres pays parties de l’accord nucléaire.
Joe Biden était vice-président de Barack Obama lorsque l’accord nucléaire fut conclu en 2015. L’Iran a toujours démenti chercher à se doter de l’arme atomique et l’accord prévoit une levée partielle des sanctions internationales, en échange de la garantie que l’Iran ne se doterait pas d’une telle arme.
M. M.