En France, si la réforme des retraites occupe aujourd’hui principalement le gouvernement et l’opposition, une autre grande réforme est aussi dans les tuyaux, celle de l’immigration, portée par le ministre de l’Intérieur, Gerald Darmanin. Ce dernier présentera d’ailleurs dès mercredi en Conseil des ministres son projet de loi. Alors que les demandes d’asile ont augmenté de 31 % en 2022 et les expulsions de 15 %, le ministre de l’Intérieur estime que ce texte est «un sujet très important pour la France». «Le gouvernement présentera un texte de 25 articles qui sera très fort. Il prévoit une simplification drastique du droit, faisant passer de douze à quatre les recours pouvant être émis par les étrangers, pour pouvoir mieux expulser», explique le locataire de la Place Beauvau. «On met fin à la fin de la double peine ! On va pouvoir expulser encore plus d’étrangers délinquants sans leur trouver d’excuses juridiques. On conditionne les titres de séjour à la réussite d’un examen de langue, pas seulement à un cours. Ce sont des avancées saluées par beaucoup des LR (Les Républicains)», ajoute-t-il. «Je sais qu’il y a aussi des critiques sur le volet travail du texte. Parlons-en ! Chez les LR, certains défendent l’idée d’instaurer des quotas pour limiter les régularisations. Discutons-en. Nous sommes ouverts à toutes les discussions dans le cadre du débat parlementaire», a déclaré Gérald Darmanin. Le projet de loi immigration défendu par le ministre arrive en pleine mobilisation contre les retraites et devrait se heurter selon toute vraisemblance à l’intransigeance du parti dirigé par le député Éric Ciotti. Partisan d’une ligne dure dans ce dossier sensible, celui-ci fustige le texte gouvernemental en brandissant notamment le spectre de régularisations massives sur l’une des dispositions phares du texte, les titres de séjour pour les métiers en tension. «Cette crainte est infondée», a tenté de rassurer le ministre en expliquant que «pour bénéficier de ce titre, il faut trois ans de vie sur le territoire national. Cela ne concerne que les métiers en tension. Il a une validité de seulement un an, qui n’ouvre pas de droit au regroupement familial». «Si M. Ciotti et M. Retailleau (le président des sénateurs LR) veulent modifier ce que nous proposons pour être absolument sûrs qu’il n’y a pas de régularisations massives, on en discutera évidemment», a-t-il mis en avant. Interrogé sur les états d’âme de l’aile gauche de la majorité présidentielle en cas de concessions trop importantes à LR, Gérald Darmanin, transfuge de l’ex-parti de Nicolas Sarkozy, a répondu dans une boutade : «Je suis l’aile gauche», en affirmant incarner un positionnement «plus social que libéral». Le ministre cherche ainsi à caresser dans le sens du poil ceux qui, pense-t-il, vont l’aider à faire passer sa loi, attendant déjà la levée de boucliers de la gauche. La Nupes (Nouvelle union populaire sociale) s’est déjà exprimée à de multiples reprises pour dénoncer la réforme de l’immigration et pour accuser Emmanuel Macron et ses ministres de populisme proche de celui de la droite dure. Reste à voir quels stratagèmes Darmanin utilisera pour tenter de faire passer sa loi à l’Assemblée Nationale, car même si aujourd’hui les députés de gauche sont obnubilés par la loi sur la retraite, ils vont certainement s’opposer tout aussi fermement contre le projet du ministre de l’Intérieur.