L’Algérie a enregistré un inquiétant rebond de contaminations quotidiennes au Covid-19, avec 1221 nouveaux cas et 15 décès. La situation s’aggrave avec la saturation des hôpitaux et le manque d’oxygène au niveau national, moins en termes de production que de répartition judicieuse.
Pat Louisa Ait Ramdane
La hausse des cas de contamination au Covid se poursuit et va de mal en pis depuis le début du mois de juillet. La hausse des contaminations quotidiennes s’est accélérée subitement. Alors que l’Algérie fait face à la 3e vague du Covid-19, les hôpitaux manquent d’oxygène pour traiter les patients infectés par le coronavirus, alerte le Dr Mohamed Yousfi, chef du service des maladies infectieuses à l’EPH de Boufarik, à Blida, qui cite un problème national. Dans un entretien accordé au site électronique TSA, le professeur a pointé un certain nombre d’insuffisances qui font que les hôpitaux ne sont pas approvisionnés en quantités suffisantes d’oxygène. Il dira que «ce qui se passe est une catastrophe». Il a expliqué que «les quatre producteurs d’oxygène opérant dans le secteur n’ont jamais été confrontés à cette demande importante en même temps. Les hôpitaux ne reçoivent donc pas les quantités suffisantes». Selon lui, «il y a un problème de répartition», citant le cas de l’EPH de Boufarik, où «ces derniers jours, plusieurs fois l’oxygène était arrivé à manquer alors que le camion d’approvisionnement n’était toujours pas arrivé». Il a suggéré de revoir surtout le circuit d’approvisionnement et de distribution de l’oxygène, d’autant qu’en ce moment tous les hôpitaux ont besoin en même temps de quantités importantes. De leur côté, les fournisseurs n’arrivent pas à suivre en matière de distribution. Pire, il a constaté que «certains établissements ont soit des petites cuves, soit carrément des bouteilles d’oxygène pour une consommation minime, avant le Covid». Selon le Professeur Yousfi, «on n’a pas retenu les leçons, tout simplement parce que pour cette consommation on a besoin d’installations beaucoup plus importantes et donc des cuves plus grandes et certainement pas les bouteilles d’oxygène qui sont dépassées». Car, a-t-il ajouté, «c’est un ancien système qui est dangereux pour les malades et pour les personnels de santé». Pour faire face à cette situation, le Dr Yousfi a lancé un appel, d’abord aux responsables et aux gestionnaires des hôpitaux qui doivent, selon lui, mettre les moyens nécessaires surtout concernant les cuves à oxygène. Il a ensuite appelé les fournisseurs pour qu’ils puissent adapter l’approvisionnement nécessaire vis-à-vis des hôpitaux. «Il y a nécessité que les opérateurs (fabricants) s’adaptent à la nouvelle donne. La consommation d’oxygène est importante et les moyens mis à la disposition des professionnels de la santé sont complètement disproportionnés», a-t-il regretté. Concernant la situation des hôpitaux, le constat est alarmant selon le spécialiste. «Nous sommes débordés. Nous avons récemment ouvert un nouveau compartiment mitoyen avec l’EPH. Nous sommes saturés, les urgences sont prises d’assaut, nous voyons arriver beaucoup de malades. Les médecins sont à bout de force, cela fait dix-sept mois qu’ils galèrent sur le front de l’épidémie. On a des malades graves, mais surtout nous enregistrons des décès tous les jours, jusqu’à deux décès chaque jour, ceci rien qu’à Boufarik», a-t-il déploré. Devant cette situation catastrophique, le Dr Mohamed Yousfi a interpellé les citoyens «pour qu’ils se ressaisissent, qu’ils pensent à nous mais aussi à ces décès et aux nombreux malades qui sont en train de mourir». Mais il s’est également interrogé : «Qu’attendent les pouvoirs publics pour appliquer les mesures barrières ? La majorité de la population a totalement abandonné les gestes sanitaires».
On n’hésite pas à organiser des fêtes au vu et au su de tout le monde. Dans les magasins et les transports, pareillement, où l’on constate l’abandon total des mesures de protection contre le virus, sous l’œil passif des pouvoirs publics, qui se sont contentés, en guise de mesure de rétablissement de l’ordre sanitaire, de faire passer le couvre-feu de minuit à… onze heures. Le laxisme est général, au diapason du relâchement et de la baisse de la garde à tous les niveaux.
L’observateur le moins sévère s’autorise alors à se poser cette inévitable question : où est l’Etat ?
L. A. R.