En 2002, après la présence surprise qui a déclenché une vague de manifestations en France et une mobilisation sans précédent des électeurs de Jean-Marie Le Pen au second tour de l’élection présidentielle, plusieurs personnalités politiques ont imputé aux médias la responsabilité du score inédit du Front National. En cause, la présence dans les journaux, notamment télévisés à quelques jours du scrutin du premier tour, d’un fait divers qui a bouleversé l’opinion publique et qui a pu motiver des électeurs indécis à mettre un bulletin pour Jean-Marie Le Pen. L’histoire de la brutale agression de Paul Voise, connue depuis comme l’affaire «Papy Voise» est aujourd’hui considérée par certains observateurs politiques comme l’une des explications à la présence du candidat du FN au second tour de la présidentielle. Depuis, à chaque rendez-vous électoral, les médias tentent prudemment de rester loin des faits divers qui pourraient à quelques jours du vote influencer une fois encore l’opinion publique. Aujourd’hui, c’est un nouveau fait divers qui divise les médias, certains refusant d’en faire «trop» par crainte de favoriser notamment le candidat Éric Zemmour qui fut le premier à évoquer la mort de Jeremy Cohen. Reprise depuis par la classe politique, certains accusent notamment les candidats de droite d’instrumentaliser cette affaire à des fins électoralistes. Survenue à la mi-février, la mort de Jérémy Cohen est désormais sous le feu des projecteurs médiatiques et s’invite dans l’élection présidentielle. Hier, l’entourage du candidat précise que le père de Jérémy Cohen est reçu par Éric Zemmour au QG de campagne de ce dernier, pour le remercier «d’avoir mis la lumière médiatique sur la tragédie». Éric Zemmour est en effet le premier candidat à l’élection présidentielle à s’être saisi de cette affaire, avant de déclencher une avalanche de réactions de la part des autres prétendants à l’Élysée. Une affaire qui s’est construite en plusieurs temps. Ce dimanche, Gérald Cohen, le père de la victime, écrit à Éric Zemmour pour l’alerter sur les circonstances de ce décès. Ce que confirme lui-même le père de la victime à BFMTV ce lundi, affirmant avoir «demandé à Éric Zemmour s’il pouvait nous aider, dans le cadre de l’enquête, pour faire quelque chose». La mort de son fils, un jeune homme de confession juive souffrant d’un léger handicap mental, a d’abord été considérée comme accidentelle, selon un article du «Parisien» paru en février. Mais une vidéo récupérée par la famille de la victime il y a quelques jours est venue balayer cette hypothèse. Ces images, retrouvées par la famille suite à un appel à témoignages, sont également diffusées sur les réseaux sociaux par l’entourage du candidat. Elles témoignent de l’agression de Jérémy Cohen par une dizaine d’individus. On le voit également fuir et finalement se faire écraser par un tramway. Si le caractère antisémite de l’agression n’est pas avéré, il n’est toutefois pas exclu. Ce lundi, Éric Zemmour dénonce un «silence assourdissant sur les faits depuis deux mois», et se demande si Jérémy Cohen est «mort pour fuir les racailles», ou «mort parce que juif», et «pourquoi cette affaire est-elle étouffée». En effet, de nombreux médias tentent, semble-t-il, d’évoquer le moins possible cette affaire qui pourrait favoriser Éric Zemmour, impliqué dans la mise en lumière de ce drame. Toutefois, est-il déontologique de cacher la vérité pour éviter d’«influencer» les votes. Les électeurs français ne sont-ils pas des adultes capables de faire la part des choses et de voter en leur âme et conscience ?