Les Occidentaux, et leurs alliés dans la région, ont presque tout essayé pour faire abandonner à l’Iran son programme nucléaire, mais sans y parvenir : les menaces, les promesses, les sanctions, les plus dures jamais imposées à un pays, aux dires de Donald Trump ; un accord en bonne et due forme, auquel ils ont associé d’autres puissances ; les assassinats, une spécialité d’Israël ; un protocole additionnel à ce même accord, autorisant les visites inopinées de ses installations ; l’abandon de cet accord, explicitement de la part des Américains, et implicitement par les Européens ; et maintenant l’appel à de nouvelles négociations en vue d’un nouvel accord leur permettant un meilleur contrôle sur ce même programme. En définitive, il n’y a que l’intervention armée ponctuelle ou la guerre en grand qu’ils n’aient pas encore essayées. La vraie question qui se pose en l’espèce, c’est de savoir si une nouvelle guerre du Golfe est évitable, sachant que ni Israël ni l’Arabie saoudite, pour ne parler que d’eux, n’accepteront de voir l’Iran faire son entrée dans le club très fermé des puissances nucléaires.
On peut le comprendre s’agissant des monarchies du Golfe, étant donné qu’elles-mêmes sont dépourvues de l’arme nucléaire et qu’elles craignent non sans de bonnes raisons que l’Iran ne finisse par s’en fabriquer. On ne le comprend pas par contre
s’agissant d’Israël, lui-même étant en possession de tout un arsenal nucléaire, et de plus en mesure de l’étoffer s’il en ressentait le besoin, d’autant plus d’ailleurs aisément qu’il n’est pas signataire du traité de non prolifération nucléaire, à la différence des monarchies du Golfe qui elles le sont toutes. Lorsque ce pays dit ne jamais accepter que l’Iran se dote de la bombe, il faut comprendre qu’il serait éventuellement prêt à l’attaquer lui-même à l’arme nucléaire pour l’en empêcher. Or il n’y a rien que l’Iran puisse faire pour l’amener à de meilleurs sentiments à son égard. Dans ce domaine aucun accord, quel qu’il soit, quels qu’en soient les signataires et les garants, ne le satisferait jamais. De là d’ailleurs son recours périodique à l’assassinat des experts iraniens, que sans doute il voudrait liquider jusqu’au dernier. On se dit que quand bien même l’Iran se résoudrait à démanteler ses installations nucléaires, il n’en serait pas entièrement rassuré pour cela. Il continuerait à poser des exigences, à ameuter la communauté internationale contre le danger d’un programme nucléaire iranien secret, et à brandir la menace d’une action directe en vue de le détruire. A la réflexion, il existe bien un moyen d’amener Israël à coexister avec l’Iran tel qu’en lui-même : ce serait que tous les «cerveaux» iraniens vivants soient tués, ou alors lui soient livrés, et qu’il ne s’en fabrique plus jamais de ce genre dans la République islamique. Pour lui, le bon accord à passer avec elle, ce serait celui qui non seulement permet le contrôle strict de ses activités nucléaires, mais qui le rend incapable d’en avoir seulement, même de très pacifiques. Il ne faut pas confondre industrie et technologie. Un pays peut avoir des capacités technologiques et disposer pourtant d’un tissu industriel médiocre. Ainsi de Cuba, qui peut envisager la conception d’un vaccin contre le Covid-19, à supposer que ce ne soit pas déjà fait, mais qui probablement ne pourrait pas en fabriquer en quantités industrielles, et par suite satisfaire une partie de la demande mondiale. La Russie est elle aussi peu ou prou dans le même cas. C’est que la technologie est dans les cerveaux. En ce sens, l’Iran a probablement déjà les capacités scientifiques de fabriquer la bombe. Dès lors il a beau dire qu’il n’a pas l’intention d’en fabriquer, ses adversaires ne le croient pas. Pour eux, qui peut quelque chose de difficile le fait.