Pour tout renforcement du dispositif militaire américain dans l’est de la Syrie, rapporté dernièrement par les médias américains et repris par d’autres, il ne s’est agi en réalité que de l’envoi de quelques chars et de leurs servants, une centaine d’hommes tout au plus. Comme de plus il ne semble pas que ce ne soit là qu’un début, rien ne permet de penser, du moins pour le moment, que l’administration Trump soit en train de revenir sur sa première décision de se retirer complètement de la Syrie, ce que d’ailleurs elle était sur le point de faire il y a de cela quelques mois. C’était avant que Donald Trump n’en décide autrement sous la pression à la fois du Pentagone et des alliés occidentaux. Les mêmes sources derrière cette information l’ont également reliée à un incident avec l’armée russe, disséminée le long de la frontière avec la Turquie, avec l’assentiment de cette dernière, incident qui se serait traduit par des blessés côté américain. La modestie de l’envoi n’en fait toutefois pas un renfort. Il aurait fallu un contingent beaucoup plus important si le but était de rééquilibrer les forces en présence dans cette région, la seule où l’armée américaine soit encore présente en Syrie. Ce que les Etats-Unis y ont dépêché, et qu’ils ont prélevé sur les forces stationnées en Irak, semble n’avoir d’autre motif que de jouer sur les nerfs des Russes, et par la même occasion des Syriens et des Turcs.
Mais évidemment pas de leurs alliés les Kurdes qui au contraire ont dû y voir un signe de bon augure. L’incident avec les Russes a pris la forme, à ce qu’il semble, d’un face à face avec des chars russes qui s’étaient placés en travers du chemin d’une de leurs patrouilles qui s’était aventurée loin de ses bases. Une agressivité qui tend à se renouveler ces derniers temps. Tout semble s’être passé à cette occasion tout au moins comme si les Russes voulaient dire aux Américains qu’il était temps pour eux de plier bagage comme ils l’avaient déjà annoncé. La méthode employée pour leur faire parvenir ce message
n’étant pas des plus amicales, les Américains y ont répondu en faisant le contraire de ce qu’on attendait d’eux. Les pousse-t-on avec des chars hors de la Syrie ? Eh bien, ils feront tout le contraire : ils feront venir un supplément de forces et du même genre que celles qui s’en étaient prises à eux, au point de blesser quelques-uns des leurs. Certes, pas au point de mettre leur vie en danger, mais quand même, ce ne sont pas là des choses à faire entre deux armées qui jusque-là avaient réussi à éviter les contacts violents. Pendant bientôt une décennie, Américains et Russes se sont opposés en Syrie sans jamais une seule fois s’affronter directement, sans même une seule erreur ou bavure. Un exploit, une admirable maîtrise de soi, une coordination entre ennemis dont on chercherait vainement un précédent. Chaque fois que les Américains voulaient attaquer des positions syriennes, ils en informaient leurs vis-à-vis russes, afin que ces derniers ne fassent rien pour les en empêcher. Et réciproquement. Ce pacte de non-agression mutuelle de près de dix ans aurait-il vécu ? Probablement pas, mais il semble bien qu’il se vive de plus en plus difficilement, et d’abord du côté russe.