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samedi 25 mars 2023

Gestion des catastrophes naturelles : Risques majeurs : les collectivités locales pointées du doigt

Les responsables des collectivités locales ont été sévèrement critiqués par l’expert en risques majeurs, Abdelkrim Chelghoum, en matière de prévention contre les catastrophes naturelles.
«Ce que nous vivons aujourd’hui en Algérie, ce sont les conséquences des défaillances,
des carences majeures et de l’impréparation des mairies dans la gestion des risques
sur leur territoire», a-t-il dénoncé.

Par Louisa Ait Ramdane
Une fois de plus, les intempéries ont mis à nu la gestion désastreuse des catastrophes naturelles dont l’impact est dramatique, autant sur les personnes que sur les biens. Les mairies ne semblent pas avoir tiré la leçon en matière de gestion de ces tragiques évènements. Abdelkrim Chelghoum a relevé que les dernières pluies ne sont pas considérées comme un phénomène hors norme : «Des pluies saisonnières qui étaient certes fortes, environ 400 mm de précipitations en une semaine, mais pas diluviennes comme certains le prétendent, ont paralysé 57 communes de la capitale. Cela veut dire que les mesures préventives basiques et minimales n’ont pas été implémentées dans ces périmètres».
Invité de la rédaction de la Chaîne 3 de la Radio algérienne, Abdelkrim Chelghoum a pointé du doigt les collectivités locales qui n´interviennent pas à temps pour arrêter les constructions qui se dressent dans les zones à risques majeurs. «On ne peut pas gérer les risques majeurs à partir du sommet, il faut les gérer à partir de la base», a-t-il indiqué, soulignant que «la mairie représente la colonne vertébrale dans l’organisation de toute prévention contre les risques majeurs, comme stipulé dans la loi 04-20». Dans ce contexte, il a dénoncé la non application de cette loi. «Les dernières pluies ont mis à nu le non-respect de la loi 04-20 relative à la prévention des risques majeurs et à la gestion des catastrophes dans le cadre du développement durable», a dénoncé Abdelkrim Chelghoum, mettant en garde que «si cette loi n’est pas appliquée de façon draconienne, l’Algérie va connaître des catastrophes qu’elle ne pourra pas gérer».
Malheureusement, à travers l’ensemble du territoire national, il y a des milliers d’exemples de constructions qui ne respectent pas la loi 04-20, a regretté l’invité de la radio. «La loi 04-20 est une loi importante pour notre pays, elle a été élaborée juste après le séisme de Boumerdès où des milliers de sites dans cette zone sinistrée ont été expertisés. Les conclusions ont montré que la cause principale des effondrements (dans 80 % des cas) était le mauvais choix des sols. Tout cela est fixé dans la loi 04-20», a expliqué le président du Club algérien des risques majeurs.

La destruction du bâtiment sur une falaise à Bir-Mourad Raïs est recommandée
Les inondations ont dévoilé les points noirs et le bricolage dans l’urbanisation et l’aménagement du territoire, a constaté encore une fois le président du Club algérien des risques majeurs, avant de s’interroger sur les conséquences de phénomènes plus graves : «Quels seraient les résultats en cas de séisme majeur ?». Citant le cas de l’immeuble en construction au bord de l’une des falaises du quartier de Bir Mourad Rais, dans la capitale, et qui menace de s’effondrer depuis les dernières pluies, l’expert s’est étonné du fait que le promoteur soit en possession de tous les documents légaux lui permettant de construire sur ce terrain. «Si l’on se réfère à la loi 04-20, ce promoteur n’aurait pas dû obtenir de permis de construire». «Cette promotion immobilière en cours de réalisation, de sept étages en surface et de quatre à cinq étages en sous-sol, n’aurait jamais dû être construite sur ce site et le permis de construire n’aurait pas dû être délivré», dira-t-il. L’invité de la rédaction de la Chaîne 3 a fait un diagnostic sans appel sur cet édifice. «Depuis 40 ans que je calcule les ouvrages et que je simule les sols, je peux vous dire que ce bâtiment ne peut pas tenir». La seule solution, a affirmé l’expert, c’est de «procéder au plus vite à son démembrement technique de façon à ne pas toucher le voisinage». Pour rappel, mardi soir, un effondrement rocheux d’une falaise surmontée d’une construction, au niveau de la station de transport des voyageurs de Bir- Mourad Rais, a été enregistré. Suite à quoi, les services de la wilaya d’Alger ont fermé provisoirement la station de transports pour protéger les citoyens. Le professeur Chelghoum a interpellé également les autorités, affirmant qu’«il est grand temps de revoir les responsabilités des uns et des autres, et la tutelle des institutions qui doivent gérer les grandes catastrophes naturelles et technologiques».
«La loi 04-20, parue en 2004, n’a pas été appliquée et il lui manque encore une trentaine de textes d’application que nous avons proposés et qui sont restés lettre morte», a témoigné l’expert, appelant à prendre en charge cette problématique à haut niveau. «La gestion des risques majeurs relève de la sécurité nationale et la sécurité nationale relève de la Présidence de la République. Il est grand temps de revoir la tutelle des institutions en charge de la gestion des grandes catastrophes naturelles et technologiques», a recommandé le président du Club algérien des risques majeurs.
L. A. R.

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