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dimanche 24 septembre 2023

Excessif

Le parti d’Emmanuel Macron, Renaissance, autrefois En Marche !, a depuis sa création toujours été très clair sur sa détestation du Rassemblement National, évoquant un parti «raciste» et «anti-républicain» qu’il fallait combattre à tout prix. Une ligne qui a surtout servi à appeler par deux fois au «barrage républicain» lors des présidentielles de 2017 et de 2022, alors que Macron se trouvait face à Marine Le Pen. Plusieurs ministres marconiste n’ont d’ailleurs pas hésité à régulièrement haranguer le parti créé par Jean-Marie Le Pen en 1979, alors sous le nom de Front National. Pourtant, le ton avait changé du tout au tout au lendemain des élections législatives de juin dernier. Renaissance, incapable d’obtenir une majorité absolue à l’Assemblée Nationale, avait alors, à la surprise générale, fait du pied par l’intermédiaire de certains de ses élus, au Rassemblement National qui entrait triomphalement au Parlement avec 89 députés. Le ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti, connu pour son antipathie viscérale vis-à-vis du parti de Marine Le Pen, avait même admis qu’il ne bouderait pas l’assistance des députés RN pour faire passer des lois et des réformes. Toutefois, depuis, le gouvernement s’est allié avec la droite traditionnelle et semble avoir fermé la porte à toute collaboration avec la droite nationaliste, poussant la Première ministre à se laisser aller à une violente diatribe contre le RN. Interrogée par Radio J dimanche, Élisabeth Borne a en effet qualifié le Rassemblement National de parti «héritier de Pétain». Pour elle, la victoire du parti est tout à fait «possible» en 2027. Selon la Cheffe du gouvernement, la gauche radicale porte une responsabilité dans cette percée. La Première ministre a ainsi accusé Jean-Luc Mélenchon et La France insoumise de «faire le jeu de l’extrême droite» et de concourir à la montée de la violence. «Je ne crois pas du tout à la normalisation du Rassemblement National. Je pense qu’il ne faut pas banaliser ses idées, ses idées sont toujours les mêmes. Alors maintenant, le Rassemblement National y met les formes, mais je continue à penser que c’est une idéologie dangereuse», a déclaré la Première ministre. Sans surprise, Marine Le Pen a rapidement réagi pour dénoncer les propos de Borne. «Les propos d’Élisabeth Borne à l’égard du Rassemblement National sont infâmes et indignes. Ils ne sont pas acceptables à l’égard du premier parti d’opposition, de ses 88 députés, de ses milliers d’élus et des millions de Français qu’il représente !» Le président du parti, Jordan Bardella, a aussi dénoncé des «propos graves, mensongers et injurieux qui salissent les millions de Français qui votent pour le RN». «Élisabeth Borne est à la fois inculte, indigne et incapable», l’a également étrillée le député RN Sébastien Chenu, en soulignant que parmi les fondateurs du mouvement figurent des résistants. Interrogée sur la possibilité d’une victoire de la fille de Jean-Marie Le Pen à la présidentielle de 2027, la Cheffe du gouvernement a répondu : «Je crains que tout soit possible. […] À force de banalisation, c’est une réelle menace». Elle a évoqué ses souvenirs du 21 avril 2002, jour de la qualification de Jean-Marie Le Pen au second tour de la présidentielle et de l’élimination du socialiste Lionel Jospin, dont elle était alors la conseillère à Matignon. Cependant, cette dernière devrait savoir depuis le temps qu’elle est en politique, que des propos excessifs tels que les siens en général non seulement ne dissuadent pas les électeurs de voter pour le RN, mais ont tendance à agacer des électeurs indécis, fatigués de voir leurs représentants jouer à se faire peur plutôt qu’à régler leurs problèmes les plus pressants. Talleyrand disait : «Tout ce qui est excessif est insignifiant», mais en politique aujourd’hui ce qui est excessif conduit souvent à l’effet inverse à celui recherché. Et c’est bien cela qui fait depuis quarante ans le «jeu du RN».

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Le 24 Septembre 2023

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