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mardi 26 septembre 2023

Evocation / Fatma Tilikète : une vie d’exil et de nostalgie

En plus de l’hommage prévu pour Tahar Djaout, le Salon du livre de Tigzirt, qui débute le 1er juin prochain, prendra le temps pour un retour sur l’œuvre et la vie de Fatma Tilikète, une poétesse de la région.

Par Lounès Ghezali

Née en 1931 à Tifra, Fatma Tilikète, fille de Mohand Amechtouh, fera ses premiers pas dans la poésie à l’école primaire de son village. Très jeune, plus que de donner des signes d’intelligence, elle se découvrira d’une sensibilité vibrante et d’une imagination abondante. Mais le destin allait se refermer vite sur elle car des circonstances un peu particulières l’obligent à quitter l’école prématurément. Dans notre société, a fortiori celle de son époque, le rôle dévolu aux femmes est celui de se marier et élever des enfants. Fort heureusement, Fatma Tilikète ne vivra pas ce que toutes les petites filles algériennes de son époque avaient vécu ; c’est-à-dire se soumettre aux traditions et se marier jeune. Une occasion s’offre à elle en 1953 où elle part en France, et là, dans l’exil, elle commence progressivement à mettre en vers ses douloureuses incertitudes. Dans ses textes, on pourra y lire une poésie écrite non pas par une personne en lisière de la société, mais par celle affrontant courageusement toutes les brutalités de son monde. Tous ses poèmes sont d’ailleurs tirés de son propre vécu. Ils se caractérisent tous par d’incessants glissements vers son enfance.
A 24 ans, elle épouse un homme engagé dans le FLN – émigration. Elle sera vite expulsée vers l’Algérie. Elle y restera jusqu’à l’année 1968 où elle repart une nouvelle fois en France. Au cours de cette année-là, elle publie simultanément deux recueils de poésie. Deux recueils qui suivent les lignes de la rétrospection comme des puzzles dans la mémoire. En plus du mal de vivre, le déracinement prend une grande dimension dans ses textes. «Le bout du miel pour elle et le fond du puits pour lui» et «Les déracinés» sont les deux titres qui structurent l’essentiel de son imaginaire poétique. Ses poèmes font resurgir la mélancolie et la nostalgie d’une vie où les difficultés pourtant ne manquaient pas. Poèmes traversés souvent de sentiments intimes y compris quand les convenances voudraient bien qu’ils soient tus.
En plus de la poésie, Fatma Tilikète se découvre aussi un talent de peintre. Elle considère la peinture comme un univers merveilleux et dans ses moments de sérénité elle dessinera quelques tableaux où elle met en relief un jeu entre la lumière et les couleurs de la nature.
Là encore, la période de son enfance à Tifra sera sa principale source d’inspiration. Elle ira jusqu’à concevoir elle-même ses propres pinceaux à l’aide de laisses pour mouton et ses couleurs sont tirées des plantes qu’elle travaillait de ses propres mains. Fatma Tilikète meurt en 2013 à l’hôpital en Algérie, à la suite d’une longue et éprouvante
maladie.
L. G.

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Le 27 septembre 2023

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