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lundi 27 mars 2023

Etats-Unis, la fragile majorité présidentielle

Le programme économique de Joe Biden se divise en deux parties, séparées et séparables dans la forme mais pas dans le fond, étant en fait les deux faces d’une même médaille. La première est consacrée, du moins pour l’essentiel, à ce que les Américains appellent «hard infrastructure», les infrastructures au sens ordinaire du terme, et l’autre à «soft infrastructure», dans laquelle prennent place les dépenses sociales, mais aussi celles ayant trait à la lutte contre le changement climatique. Cet agenda dans son ensemble est appelé «Build Back Better» ; en bon français : «Reconstruire en mieux». La loi sur les infrastructures est déjà effective, ayant été adoptée tour à tour par le Sénat et la Chambre des représentants, non sans avoir rencontré des résistances d’ailleurs. Paradoxalement, ce ne sont pas les républicains qui avaient retardé son adoption, mais les démocrates progressistes, qui voulaient que les deux lois soient votées en même temps, de crainte que la deuxième, celle qui comptait le plus à leurs yeux, ne soit ensuite revue à la baisse, ou pire encore, repoussée par le Sénat. Finalement elle était passée, mais à une faible majorité, les plus à gauche d’entre les démocrates ayant préféré s’abstenir.

Les démocrates sont majoritaires à la Chambre des représentants, encore que ce ne soit pas de beaucoup, mais pas au Sénat par contre, où ils sont à égalité avec les républicains en termes de sièges. Cela veut dire que pour chaque projet de loi en discussion, ils ont besoin de toutes leurs voix pour en faire une loi, du moins pour celles qui n’ont besoin que d’une majorité simple, car pour les autres la partie est bien entendue perdue d’avance. Qu’une seule vienne à leur manquer, et c’est l’échec, le blocage, la crise. Or, dès le départ, deux de leurs sénateurs trouvaient à redire à l’agenda présidentiel. L’une, car c’est une femme, Krysten Sinema, sénatrice de l’Arizona, a fini par se ranger à l’avis de son camp, mais pas le deuxième, Joe Manchin, sénateur de la Virginie-Occidentale, qui vient de faire savoir qu’il ne voterait pas la loi sur les dépenses sociales, justifiant après coup les craintes des démocrates progressistes. La Maison-Blanche a vivement réagi, qui a accusé le sénateur de manquer à sa parole, mais sans pour autant couper les ponts avec lui, n’ayant pas perdu tout espoir de le faire revenir à de meilleurs sentiments. Les chances qu’il en soit ainsi sont minimes. Le sénateur Manchin ne s’oppose pas seulement aux dépenses sociales, dont il pense qu’elles ne feront qu’ajouter à la dette publique, déjà grande, et à l’inflation, déjà à un niveau non atteint depuis longtemps aux Etats-Unis, mais également à tout ce que le programme présidentiel comporte d’hostilité envers le secteur pétrolier, important dans son Etat. Il ne peut voter la loi en question sans mettre en danger sa propre réélection. La majorité présidentielle n’a tenu jusque-là qu’à un fil qui maintenant menace de se rompre. Joe Manchin est un de ces nombreux démocrates qui ne le sont que de nom. Il pourrait tout aussi bien passer chez les républicains, qui d’ailleurs l’invitent à venir les rejoindre. Ce qui le cas échéant leur donnerait la majorité au Sénat. Jusque-là le sénateur rebelle s’y est refusé. Mais jusqu’à quand ?

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