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mercredi 29 mars 2023

En Tunisie, le moment de vérité, c’est dans deux ans

De même que le premier, le deuxième tour des législatives tunisiennes a connu une faible participation, estimée à un peu plus de 11 %, quasiment le même taux qu’il y a plus d’un mois. Ce qui en réalité ne constitue pas une surprise, ni la situation politique ni la situation économique n’ayant évolué dans l’intervalle, pas plus en mal qu’en bien du reste. Evidemment, les oppositions regroupées dans le Front de salut national, ayant pour tête d’affiche Najib Chabi, pour substance Ennahdha et pour véritable chef Rached Ghannouchi, n’a pas tardé à s’en attribuer le mérite, comme dans la foulée du premier tour, faisant du renversement du président en exercice, Kaïs Saïed, plus que jamais la tâche urgente du moment. Il s’est félicité de la forte abstention, certes ; pour autant, il s’est gardé de la présenter comme la conséquence directe de son appel au boycott, par peur du ridicule sans doute. Car il est clair que ni cette fois ni la fois précédente, les électeurs ne se sont abstenus dans l’intention expresse d’exprimer leur opposition à Saïed, les occasions n’ayant pas manqué auparavant pour ce faire, sans qu’aucune n’ait été saisie par eux pour délivrer ce message à l’exclusion de tout autre.

On ne compte pas depuis le 22 juillet 2021 le nombre des appels à descendre en masse dans la rue pour faire subir à Saïed le même sort qu’à Ben Ali, qui n’ont guère produit l’effet escompté. Il en était encore question en termes on ne peut plus explicites la veille du deuxième tour de dimanche dernier, sans que le « dictateur » s’en émeuve si peu que ce soit, et réponde autrement qu’en paroles à des détracteurs pris de rage. Saïed est assez fin politique pour laisser libre de ses mouvements une opposition sans véritable impact sur l’état de l’opinion, et dont chaque action est une preuve par l’absurde de sa marginalité. Il n’est pas jusqu’à la faible participation à ces législatives qui d’une certaine façon ne le conforte dans ses choix politiques fondamentaux pour la Tunisie. Quelqu’un qui a rétabli le régime présidentiel dans la conviction que c’est lui qui convient pour l’heure à son pays ne peut pas craindre une faible participation à l’élection d’une Assemblée que lui-même a ramenée à sa plus simple expression. En fait, il n’a pas même cherché à persuader les électeurs de se rendre massivement aux urnes, un passage obligé pourtant. Saïed ne voulait pas d’une forte participation, qui si elle s’était malgré tout produite aurait été la preuve que les Tunisiens voient dans l’Assemblée le centre légitime du pouvoir. Ce deuxième tour des législatives maintenant tenu, le nouveau régime dispose des rouages politiques nécessaires pour mener son action de redressement économique, où il reste tant à faire, sur lequel il sera en définitive jugé par les Tunisiens, dont un grand nombre en effet est en grande difficulté. C’est que le temps presse, la prochaine présidentielle étant dans moins de deux ans. D’ici là, le Front de salut national ne fera que perdre son temps s’il pense pouvoir fomenter la révolution. S’il existe encore, ce qui est loin d’être évident, il pourra présenter un candidat unique contre Saïed, et tenter de le faire élire. S’il y parvient, il aura quand même obtenu ce qu’il veut tant aujourd’hui : et la chute du « dictateur » et le retour à la Constitution de 2014. Or deux ans, c’est vite passé.

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