18.9 C
Alger
vendredi 29 mars 2024

En temps de guerre rien ne doit aller normalement

A peine 24 heures après la signature sous l’égide à la fois de l’ONU et de la Turquie de l’accord entre les belligérants sur la reprise des exportations des céréales ukrainiennes qu’un dépôt des céréales dans le port d’Odessa est bombardé. Assurément par les Russes a aussitôt affirmé Kiev, ce que Moscou a démenti formellement, sans accuser personne pour sa part. L’ONU a condamné le fait sans désigner le coupable, et la Turquie, montrant plus de retenue encore, s’est contentée de rapporter ce qu’ont dit les Russes, à savoir qu’ils n’étaient pour rien dans cette affaire. Américains et Européens ont purement et simplement repris à leur compte les accusations de l’allié ukrainien, l’idée que celui-ci puisse mentir semblant ne même pas leur avoir effleuré l’esprit : un bombardement de ce genre, ce ne peut être que le fait de ces agresseurs et malfaisants intrinsèques de Russes. En fait, ces derniers sont les derniers qu’il faudrait soupçonner en l’occurrence, pour la bonne raison qu’il est plus dans leur intérêt à eux que dans celui des Ukrainiens que les céréales ukrainiennes puissent être commercialisées à peu près comme en temps de paix.

Il en est de ces céréales comme de leur gaz : eux n’auraient pas mieux demandé que de continuer à le livrer à leurs clients européens, le plus normalement du monde. Ce sont ces derniers qui sont à l’origine des difficultés d’approvisionnement qu’ils souffrent pour l’heure, et dont ils risquent de souffrir plus encore dans les mois qui viennent. Les mesures de rétorsion prises par les Occidentaux ont ouvert un nouveau front dans le conflit en cours, dont eux-mêmes se seraient volontiers passés : la guerre économique. Toutes les mesures qu’ils ont eu, eux les Russes, à prendre dans ce domaine ont été des réactions à des initiatives prises au préalable à leur encontre. Leur intérêt est que l’accord sur les céréales, d’autant qu’il comprend leur propres céréales et fertilisants, marche, de façon à ce qu’aucune crise alimentaire mondiale ne puisse éventuellement leur être imputée. Or, ici comme ailleurs, l’intérêt des Ukrainiens est à l’opposé de celui des Russes. Si la famine sévit dans le monde, pour cause de guerre chez eux et contre eux, la faute en reviendra évidemment à la partie ayant pris la responsabilité de la déclencher, non pas à eux qui après tout en sont ses premières victimes. Les Russes voudraient que personne dans le monde ne se ressente de cette guerre, à part les forces armées et autorités ukrainiennes, pas même donc les civils ukrainiens. Le pouvoir ukrainien veut tout le contraire, que le conflit s’étende au monde entier, et y cause partout des ravages. Ainsi seulement il ne sera pas seul face à la puissante armée d’invasion russe. Ce qui est vrai du gaz et des produits alimentaires est vrai de la guerre dans son ensemble. Ayant pris la responsabilité de la déclencher, les Russes voudraient qu’elle dure le moins longtemps possible. Ce n’est d’ailleurs que sous cette condition qu’ils puissent espérer en sortir et vainqueurs et en bon état dans l’ensemble. Une guerre qui se prolonge, c’est pour eux, et plus encore pour leurs ennemis, Ukrainiens et Occidentaux, une guerre qu’ils sont en train de perdre. Pour leurs ennemis, rien ne devrait se passer comme du temps de la paix. Autrement, ce serait comme si la Russie avait déjà gagné la guerre.

Article récent

--Pub--spot_img

Articles de la catégorie

- Advertisement -spot_img