Au jour d’aujourd’hui, pour ceux qui s’intéressent de près à ce tournant qui voit l’arrivée au pouvoir d’un nouveau président des Etats-Unis, ce n’est même plus par jours qu’il faut compter les événements mais par heures. Le fait est que depuis l’attaque du Capitole par une foule violente des partisans du président sortant, un certain 6 janvier, qui assurément fera date, les révélations sur ce qui s’était passé non seulement ce jour, mais le jour d’avant, loin de faire tomber l’intérêt de l’observateur n’ont fait au contraire que l’intensifier. La dernière de ces révélations, vieille seulement de quelques heures, est que parmi les républicains présents sur les lieux, il y en avait qui savaient par avance que le Capitole serait pris d’assaut en même temps que s’y déroulait la ratification par le Congrès de la victoire de Joe Biden sur Donald Trump. Certains d’entre ces «officiels» avaient été vus la veille en train de faire faire le «tour de reconnaissance» du Capitole à des gens qu’on ne va pas jusqu’à décrire comme des gens tout à fait interlopes mais dont on laisse néanmoins entendre qu’ils ne se fondaient pas dans le décor. Une enquête a été demandée par Nancy Pelosi, la présidente démocrate de la Chambre des représentants, en vue de tirer tout cela au clair. Si le fait était établi, a-t-elle averti, des poursuites judicaires seraient engagées contre les coupables, qu’ils soient représentants ou sénateurs.
Comme le cas échéant ils se recruteraient tous dans les rangs républicains, leur inculpation, non plus seulement pour incitation à l’insurrection mais pour participation à cette dernière, est qu’elle ne faciliterait pas la tâche principale que s’était fixée le nouveau président, en plus de vaincre la pandémie, de réconcilier les Américains. Relevons au passage cette bizarrerie : cette perspective semble faire plus peur en France qu’aux Etats-Unis, du moins dans le microcosme médiatique. Ce n’est qu’en France en tout cas que l’on voit une fissure naître puis s’élargir dans les rangs démocrates, symétrique à celle très nette en revanche qui fracture déjà le camp républicain. Une division dont serait responsable au premier chef Nancy Pelosi, dans son camp la plus déterminée, dit-on, à abattre Donald Trump. La réalité, c’est que les démocrates sont unis derrière Joe Biden, en même temps que tout à fait solidaires de Nancy Pelosi, comme en atteste leur vote unanime de l’impeachment contre Trump. S’ils font bloc, c’est d’ailleurs en vue d’un objectif précis : tuer politiquement Trump, en finir avec lui une bonne fois pour toutes, après l’avoir vaincu électoralement. Demain, ou après-demain, quand viendra l’heure de prononcer la sentence contre lui, pas une voix démocrate ne manquera à cette dernière, cela ne fait pas l’ombre d’un doute. On n’observera pas la même unanimité dans le rejet côté républicain. Lors du vote de l’impeachment, dix des représentants républicains ont joint leurs voix à celles des démocrates. Pour que Trump soit condamné devant le Sénat à l’inéligibilité, à la mort politique autrement dit, car c’est là désormais le but recherché par ses adversaires des deux bords, dix-sept républicains au moins doivent sortir du rang pour prêter main-forte à l’ennemi démocrate. Autrement Trump est sauvé, il pourra avoir un avenir politique. S’il est reconnu coupable du chef d’incitation à l’insurrection et qu’il est condamné, le plus probable est qu’il ne sera pas le seul à en payer le prix fort, mais également le parti républicain, qui probablement ne survivra pas à l’épreuve.