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vendredi 22 septembre 2023

EL Meya expose à l’espace Rhizome : «Oumlil» ou la monographie à l’honneur

La prochaine exposition qui aura lieu à l’espace Rhizome, du 20 au mars au 10 avril, est intitulée «Oumlil». Elle est le fruit du travail de l’artiste El Meya, alias Maya Benchikh el Fegoun, comprenant des œuvres qui seront dévoilées pour la première fois au public.

Par Abla Selles

Elles font partie d’un livre qui sera publié officiellement, en parallèle à cette exposition. Ce livre, fait-main et en édition limitée, est spécialement conçu et produit dans un style et un format pour imiter une «exposition mobile». Il comprend des essais de cinq autrices : Anissa Bouayed, Guillemette Grobon, Hajar Bali, Karima Lazali et Bernadette Dufrene-Nadia Saou. L’exposition «Oumlil» est la première monographie de l’artiste EL Meya, comprenant une série d’œuvres qu’elle a développées entre 2015 et 2017. Le livre comprend plus de vingt peintures et croquis et a été délibérément conçu et produit dans un style et un format pour imiter une «exposition mobile». A propos d’El Meya et d’Oumlil : «L’Ogresse, c’est elle !», Anissa Bouayed écrit : «Oumlil, Oum Lil. Ce projet porte un nom, un nom qui se compose comme on tisse une toile, polysémique par ses entremêlements de références arabes à la mère et à la nuit, de référence berbère à la mer Méditerranée. Il est comme une invitation à penser large, à embrasser une histoire longue, aux influences réciproques entre civilisations. (…) Le projet Oumlil est à la jonction d’une approche anthropologique sur les rites, les mythes, le sacré et de réflexions esthétiques sur la représentation des symboles, sur les limites de la représentation de la sexualité, du corps, de la violence, de la mort… ce qui lui confère cette énorme charge transgressive. Il y a quelque chose de performatif dans cette prise de risque. Le défi est là, dans la transgression. ‘’Il n’y a pas d’œil innocent’’, disait l’historien de l’art Ernst Gombrich. (…) La première impression ressentie relève de la catégorie du choc visuel. Même si la marge de manœuvre est étroite, El Meya a évité de tomber dans la provocation avec ses risques d’être gratuite, contre-productive et répulsive. Sa stratégie, c’est d’étonner, voire de déranger ; qui fait que l’on s’arrête pour prendre le temps de comprendre ce que peindre signifie, pour elle et pour nous. Elle tend ses toiles entre la réalité et nous, pour lutter contre les ‘’évidences’’, les apparences, contre les choses ‘’allant de soi’’, qui ‘’crèvent les yeux’’… Elle nous demande de cheminer de toile en toile, devant lesquelles nous ferions ‘’arrêt sur image’’, comme devant autant d’écrans, pour nous troubler d’abord, pour qu’on s’interroge ensuite, une fois passé ce premier sentiment d’inquiétante étrangeté. (…) Ainsi le projet Oumlil raccorde les portraits de femmes mais aussi d’hommes à la question du pouvoir ; elle saisit dans la famille, – ce plus petit dénominateur commun de la structure sociale qu’elle scrute en différents moments, ces couples truculents et inquiétants pour dire la question de la distribution de l’autorité dans le mariage, dans la maison avec des espaces ‘’genrés’’ comme le salon ou la rue… Elle dévoile l’impact de la division domestique du travail qui s’applique à ces notions d’espaces intérieurs et extérieurs comme autant de chasses gardées de l’un ou l’autre sexe. (…) Ces œuvres sont stimulantes, car elles nous demadent une lecture active, en cherchant ce qu’il y a dessous autant que ce qu’on voit dessus, ou qu’on imagine à côté, dans cet immatériel hors-champ pourtant nécessaire et présent à nos esprits (…)». El Meya est née en 1988 à Constantine. Diplômée de l’Ecole des beaux-Arts d’Alger en 2013, elle vit et travaille à Alger. La peinture de l’artiste, dans sa forme naïve, n’est nullement innocente. Elle traite du corps, de la chair et des blessures. Le travail d’El Meya questionne les représentations de sa société algérienne, maghrébine et méditerranéenne, la place de la peinture au regard de l’histoire de l’art. Elle étend ses toiles entre le réel et nous-mêmes, pour contrer «l’évidence», les apparences, les choses «prises pour acquises», qui «sont évidentes»… Elle nous demande de cheminer de toile en toile, toiles devant lesquelles nous restons «figé.e.s», comme devant tant d’écrans, d’abord, pour nous troubler, ensuite, pour que l’on vienne à s’interroger, une fois ce premier sentiment d’étrangeté inquiétante passé. Ses images sont épurées et vont droit au
but : saisir l’emprise symbolique sur nos actions.
A. S.

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