22.9 C
Alger
vendredi 29 mars 2024

Derrière la crise ukrainienne, la question de la sécurité en Europe

Quelle que soit l’issue de la crise en train de se développer sous nos yeux, entre d’une part les Etats-Unis et l’Otan, et accessoirement la Grande-Bretagne, à propos de la tension à la frontière entre la Russie et l’Ukraine, que la première finisse ou non par envahir la deuxième, une chose semble certaine : la sécurité en Europe ne se posera plus dans les mêmes termes. Depuis la fin de l’Union soviétique, l’Otan n’a fait que s’élargir à l’est de l’Europe, pénétrant plus avant dans ce qui constituait par le passé le bloc communiste, rapprochant toujours plus près des frontières de la Russie sa présence et ses installations militaires, destinées toutes à la contenir, en attendant de la faire se replier sur ses derniers retranchements. De même que si le conflit est-ouest persistait, que la Fédération de Russie n’était qu’une nouvelle appellation recouvrant la même réalité : le camp de l’est, avec des morceaux en moins certes, mais qui néanmoins restait le même quant à l’essentiel, en ce sens qu’il était toujours dominé par la Russie, et qu’il représentait la même menace existentielle pour le «monde libre». Celui-ci par contre non seulement est resté entier mais s’est élargi aux transfuges de l’est, et il est toujours emmené par le même leader, les Etats-Unis.

Tout se passait donc comme si la guerre froide se poursuivait malgré l’effondrement de l’un des deux camps, et en dépit de la victoire de l’autre. Le terme de cette poussée à l’est, si elle devait continuer sur sa lancée, c’est le passage des frontières russes, et au bout du processus, l’implosion de la Russie inexorablement suivie de son démembrement. N’est-ce pas ainsi en effet que finissent les empires ? C’est à cette perspective que les Russes sont aujourd’hui déterminés à faire échec. La Russie n’a plus d’espace où elle pourrait encore reculer, a déclaré récemment son président, d’un visage et sur un ton qui ne laissaient aucun doute sur sa résolution à inverser la tendance, à faire reculer l’Otan aux frontières qui étaient les siennes en 1997. Par rapport à cet objectif stratégique, la tension avec l’Ukraine est une sorte d’entrée en matière, un prétexte ou un vecteur. Celle-ci ne serait pas envahie si les Etats-Unis et l’Otan acceptaient de battre en retraite. Elle le serait probablement si les Etats-Unis refusaient de donner à la Russie les garanties sécuritaires qu’elle exige d’eux, et que sans doute elle est déterminée à leur arracher dans le besoin. Le but n’est pas de l’annexer, comme fut annexée la Crimée, et d’une certaine façon aussi le Donbass, mais d’empêcher que la poussée à l’est se rapproche de ses frontières occidentales. Or là où se joue la sécurité de la Russie est en cause également celle de l’Europe. Mais pas celle des Etats-Unis qui eux sont loin. Rien de ce qui arrive à l’est de l’Europe ne met en danger si peu que ce soit leur sécurité, quand bien même l’Ukraine serait envahie en entier. Les Etats-Unis incitent à l’élargissement de l’Otan non pas parce que leur sécurité en dépend, mais parce qu’ils s’évertuent à réunir les conditions de l’effondrement de la Russie, après avoir obtenu celui de l’Union soviétique. Si cela conduit au retour de la guerre, tant pis, puisque de toute façon ce n’est pas en Amérique que le cas échéant elle se produira, mais en Europe, comme ce fut toujours le cas.

Article récent

--Pub--spot_img

Articles de la catégorie

- Advertisement -spot_img