Alors que les résultats de la droite au premier tour des élections législatives de dimanche ont douché les espoirs des Républicains de remonter la pente après la dégringolade de la présidentielle, en parallèle LR est également éliminé des instances dirigeantes de la droite européenne, le parti des démocrates-chrétiens européen, dont la droite française est également membre. Une élimination que le président de la droite française, Christian Jacob a, pour le moins, du mal à accepter. Le président des LR pour encore quelques jours, s’en prend directement à Manfred Weber, le président nouvellement élu du PPE, dans un courrier cinglant. Cette missive fait suite à la défaite de Franck Proust aux élections internes lors du congrès de Rotterdam, le 1er juin. Vice-président sortant, Proust faisait partie des 11 candidats pour 10 postes à pourvoir. L’élu de Nîmes s’est classé 11e avec 157 voix, donc le seul battu. Son score atteste d’un décrochage par rapport aux autres candidats. En effet, entre la mieux élue des vice-présidents, la commissaire européenne Mariya Gabriel (403 voix), et le 10e élu, l’Espagnol Esteban Gonzalez Pons (303 voix), les écarts se tiennent. Pour Christian Jacob, c’est le signe d’une action concertée dirigée contre la France. Et le responsable de cet échec humiliant ne peut être que l’Allemand Manfred Weber. «Je regrette que vous n’ayez pas défendu le candidat français à la vice-présidence, qui a été préalablement écarté, en accord avec les autres délégations, contrairement aux engagements que vous aviez pris envers moi, accuse Jacob. C’est un geste politique fort dont chacun aura à tirer les conséquences. Je considère que la relation de confiance que nous avions établie depuis plusieurs années a été sérieusement entamée, ce que je regrette vivement». Christian Jacob accuse plus précisément la mainmise allemande sur le PPE. Néanmoins, l’échec de Franck Proust peut aussi s’expliquer tout autrement, et dans les rangs LR on ne s’en prive pas. En effet, tout indiquait que l’élu de Nîmes, ancien député européen, allait tout droit à la défaite. Pour deux raisons assez objectives. D’abord, le président LR de Nîmes métropole n’est plus député européen depuis mai 2019, autant dire que son implication au niveau européen est minime. «Cela fait deux ans qu’on ne l’a pas vu au Parlement européen», se plaint-on chez les actuels députés LR. Surtout, Proust a été condamné en justice le 14 avril 2022 par la cour d’appel de Nîmes à une amende de 15 000 euros et à cinq ans d’inéligibilité pour trafic d’influence. Toutefois, si Jacob se défoule sur les Allemands, d’autres personnalités LR semblent comprendre que le problème est ailleurs, au sein même de leur mouvement. La défaite de Franck Proust était en effet annoncée, en vain, par Michel Barnier ou encore François-Xavier Bellamy, l’actuel chef de la délégation des eurodéputés LR, qui ne décolère pas contre les instances dirigeantes, à Paris. Un «aveuglement» incompréhensible au regard de l’influence française qu’il s’agit, dans ce type d’instances, de préserver. La descente aux enfers des Français au PPE est vertigineuse : il y a seulement trois ans, le PPE était dirigé par l’inimitable Joseph Daul, un Alsacien discret mais aux réseaux impressionnants. Aujourd’hui, il n’y a plus aucun français au bureau du parti. La perte de sang-froid de Jacob peut toutefois s’expliquer par son propre embarras après l’humiliante défaite de la candidate LR à la présidentielle et les mauvais sondages pour les législatives. Cette nouvelle défaite était visiblement pour le président de la droite la défaite de trop. S’apprêtant à bientôt quitter ses fonctions, Jacob laissera ainsi un parti plus mal en point que jamais, que même son propre fondateur, Nicolas Sarkozy, a désormais déserté. Reste à voir si LR connaîtra le même sort que le PS qui ne pèse plus rien politiquement et qui continue à exister uniquement car il est une relique de temps plus prestigieux, ou si la droite traditionnelle arrivera, elle, à relever la tête avant que tous ses cadres ne l’abandonnent.