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dimanche 28 mai 2023

Dans l’attente du deuxième acte de la guerre

Il y a seulement quelques jours, les analystes militaires occidentaux se relayant sur les plateaux de télévisons soutenaient mordicus que Bakhmout, loin d’être conquise par les Russes, était en fait en train de se transformer en une souricière dans laquelle ses occupants seraient bientôt faits comme des rats. Puis voilà que c’est Evgueni Prigojine, qui n’est plus à présenter, qui annonce la prise complète de la ville, ou plutôt de ce qu’il en reste, c’est-à-dire de ses ruines. Interrogé à cet égard à Hiroshima, Volodymyr Zelensky a nié que tout combat ait cessé à Bakhmout, mais que néanmoins celle-ci était rasée, et qu’elle n’existait plus que dans le cœur des Ukrainiens. Voilà qui a l’air plutôt de confirmer l’annonce russe que de la démentir. On l’aura peut-être remarqué, mais dans cette guerre tout ce que les Ukrainiens perdent devient aussitôt, dans les médias occidentaux tout au moins, un piège dans lequel les Russes sont tombés. Une défaite est d’autant plus cuisante qu’elle est symbolique, et qu’elle ne préjuge pas de la suite. Le fait est qu’on ne sait pas quelle sera cette suite. Kramatorsk ? Sloviansk ? Comme on l’ignore, on reste mentalement là où pendant des mois on s’était trouvé immobilisé.

Les perdants, Ukrainiens et alliés, tendent même à refaire la bataille, mais en en faisant une éclatante victoire différée. Les vainqueurs eux ne demandent qu’à quitter les lieux. Ils comptent les avoir vidés le 1er juin au plus tard. Si l’on savait où la guerre allait après cela transporter son épicentre, on saurait du même coup à quoi la bataille de Bakhmout a servi, quelle a été son utilité, à quoi a-t-elle été le prélude. Et encore, à la condition qu’elle n’ait pas été une feinte, destinée à cacher les véritables intentions, soit des Russes soit des Ukrainiens. Dans une semaine, on sera le 1er juin et au début du compte à rebours pour la contre-offensive ukrainienne. Celle-ci était d’abord prévue pour le mois de mai, mais elle a été reportée, sur décision du président ukrainien, pour un supplément de préparation. Les Ukrainiens voulaient des avions de combat, et pas n’importe lesquels, des F-16 américains, ce qu’ils semblent pouvoir obtenir en fin de compte, sauf que ce n’est pas dans l’immédiat, d’autant qu’en plus des appareils ils ont besoin de pilotes sachant s’en servir. Aussi n’est-il pas à exclure que la contre-offensive soit repoussée de plusieurs mois, jusqu’au moment où avions et pilotes seront disponibles. Le cas échéant, ce sera contre l’avis des Américains, qui eux auraient voulu que la contre-offensive soit déjà en cours. Ce serait oublier qu’il n’y a pas qu’une seule contre-offensive en réserve, mais deux, l’ukrainienne et la russe. Jusque-là il n’a été question que de la première, dans l’idée que l’occupant c’est la Russie et que c’est au pays occupé de réagir en premier. Il n’en reste pas moins que les Russes peuvent à tout moment repartir à l’assaut. Il peut même arriver que ce soit eux et non pas les Ukrainiens qui les premiers se remettent en mouvement. Eux sont prêts pour cela, à la différence des Ukrainiens. Toujours est-il que la contre-offensive, quelle qu’elle soit, ukrainienne ou russe, sera le deuxième acte de la guerre. Il semble en effet impossible que celle-ci en reste là.

 

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